L'agenda est fort occupé, mais pour cette soirée, les astres se sont alignés, puisque les trois propositions danse à ce Fringe se présentaient à moi dans un ordre chronologique qui me permettait de les voir toutes les trois. Voici donc le compte-rendu de mes pas de spectateur en cette soirée de Festival Fringe sous la pluie.
Premier arrêt à l'Espace Freestanding pour "Dance Side of the Moon" de Helen Simard avec Maxine Segalowitz à l'interprétation et Kim-Sanh Châu aux projections vidéo. Arrivé près de trente minutes à l'avance, première frayeur, c'est "sold out", m'annonce-t-on. Mais, ouf, un désistement déjà annoncé, me permet de prendre ma place dans la file, billet en main. Il y aura un peu plus de trente places pour les spectateurs et près de six qui devront rester libres pour les fins de la présentation. Dans cet escalier menant à la salle du deuxième, c'est "hot" et très achalandé. Une fois entré, c'est "full house" et "full hot" et moi tout à fait prêt pour la présentation sur mon siège sur laquelle je trouve une fiche qui indiquait "If you sit here, it might get intense". J'ai lu, mais je reste pour la prestation d'une durée de 43 minutes. Bon OK, vous vous demanderez, durée un peu atypique, mais si j'ajoute que la présentation se fera sur le fond musical du disque mythique "Dark Side of the Moon" du groupe Pink Floyd, dois-je le rajouter, dont la durée, vous l'aurez deviné est d'environ 43 minutes, tout s'explique.
Image tirée du site du Fringe
Une fois, le moment venu, Maxine Segalowitz rentre dans la place par la porte arrière (un tout petit local rectangulaire) et se dirige à l'autre extrémité pour sortir le vinyle de sa pochette et le mettre sur la platine. Et c'est là que la magie commence à opérer. De cet album qui a occupé une grande partie de mon adolescence et que je redécouvre avec grand plaisir, elle prend toute la place. Je devrais plutôt dire, elle occupe toute la place, intensément par ses mouvements et aussi son regard. Certains moments sont tout à fait électriques, d'autres remplis de potentialité qui deviennent explosifs. Sur ces projections vidéo, juste devant moi, parfois, elle s'y fond et à d'autres moments prend à partie les chaises devant nous pour les mettre sur certains spectateurs dont les deux spectatrices à mes côtés. Elles les auront sur les genoux, un bon bout de temps, jusqu'à ce qu'elles en soient libérées par l'interprète. Les mouvements, sur fond "the moon" et de paysages se modulent parfaitement au rythme des différentes pièces qui ravissent autant les yeux que les oreilles. (Au moment de l'écriture de ce texte, mon lecteur CD m'a déjà fait écouter deux fois, l'intégrale de cet opus musical). 43 minutes, et le temps de retourner le vinyle, passent bien vite et moi, après les applaudissements fort bien mérités, je quitte fort satisfait et heureux de ces moments de prestation intense et spectaculaire dans ce lieu intime. La musique est toujours une composante majeure des oeuvres de la chorégraphe mais pour cette création, Roger White, partenaire de toujours de la chorégraphe, laisse sa guitare et son son "pesant" au vestiaire pour occuper une place plus discrète à l'entrée de la salle.
Deuxième arrêt, Mission Santa Cruz, après quelques pas de course sous la pluie, question de ne pas arriver en retard, mission accomplie ! Au programme, "Rétrospective; Une compilation" d'Izabella Marengo, accompagnée sur scène, en texte et en musique par Thomas Bégin, Jean-François Desrosiers et Jean-François Raynaud. Des deux programmes possibles, au choix des spectateurs, c'est le B qui a été choisi et annoncé de façon très solennelle. La suite débute par une chanson et se poursuit avec une suite de tableaux de danse entrecoupés par un texte fort intéressant et une prestation humaine et grenouilles mécaniques.
Tiré du site du Fringe
Si certains tableaux ressortaient bien, il en reste que cette "Compilation" aurait gagné en intérêt si j'avais senti une trame narrative plus cohérente. Il me semble qu'il y avait là, les ingrédients (danse, poésie et interprétation musicale, guitare et clavier) pour nous entraîner dans une "histoire" fort séduisante. J'aurais plus embarqué dans une balade de cette femme dans son univers, parce que les ingrédients pour ce faire y étaient.
Troisième arrêt, au Studio Multimédia du Conservatoire, quelques pas plus loin, mais avec le temps pour m'y rendre. Je m'y rendais pour y découvrir la proposition de Stéphanie Fromentin et Emmalie Ruest. Mais, en plus de leur prestation "It's fine", nous aurons droit à deux autres parties (qui les précèdent). "(an)other" de Tracey Norman et "You threw me off" d'Alison Daley avec sur scène Justine Comfort et Denise Solleza pour les deux oeuvres et Miles Gosse qui se joint à elles pour la deuxième. Trois oeuvres qui ont aussi comme point commun la présence sur scène de deux chaises dont l'utilité sera celle du caméléon fort bien adapté au propos.
Tiré du site du Fringe
Les lumières se ferment sur une salle trop peu remplie, selon moi, pour débuter ce programme triple fort bien réussi. "(an)other" met fort bien en scène la relation entre deux femmes . Les gestes éloquents qui nous présentent un propos chorégraphique sur la relation de ces deux femmes. Relations fort bien présentées qui m'intéresse sur jusqu'au point final. La pièce la moins ludique de la soirée, à moins que l'on considère, comme je serais tenté de le penser, comme un jeu, ces interactions humaines. La plus poétique oeuvre de la soirée, je serais tenté d'affirmer.
Après une très courte pause, nous apparaissent, deux femmes et un homme. Si au départ, cet homme (Miles Gosse) au physique peu orthodoxe pour un danseur, la suite nous permettra de constater que la beauté du geste peut se révéler magnifiquement, peu importe les standards corporels que nous avons. "You threw me off" s'avère une oeuvre déroutante avec ces différentes déclinaisons qui alternent entre le jeu et la prestation. Une oeuvre qui franchit le quatrième mur sans que l'on se sente agressé, mais, néanmoins, nettement interpellé. Un moment de danse qui nous transporte dans une série de tableaux qui alternent entre jeux aux règlements dévoilés "just in time" avec le bandeau rouge associé et jeux du corps en mouvement. Moins poétique que la première oeuvre au programme, mais plus intrigante à découvrir.
Autre courte pause et nous apparaît, Stéphanie Fromentin et Emmalie Ruest pour "It's fine". Annoncée comme une pièce qui repose "sur un dispositif qui ne se prend pas au sérieux", mais pour ce faire, elles le font avec sérieux. En entrée de jeu, elles demandent la collaboration d'une personne dans la salle qui s’avérera une spectatrice pour résoudre un cube Rubik (qui reviendra en fin de prestation, encore à résoudre !). J'ai discrètement "passé mon tour" pour consacrer toute mon attention à ce qui viendra plus tard. Il en reste que c'est au tempo de la personne, pas très loin de moi, qui dira oui à cette demande que la suite de la présentation se poursuivra. Une pièce qui nous présente des moments d'obscurité pour pouvoir imaginer ce qui se passe devant nous. Et au retour de la lumière, la scène se trouve parée d'atours et de mouvements fort attrayants. Une pièce qui ne se prend pas au sérieux, mais qui nous intéresse avec l'interprétation sérieusement engagée des deux interprètes. Une fin de soirée fort bien réussie par deux femmes dont je suis avec plaisir les pas sur la scène depuis longtemps.
Aucun commentaire:
Publier un commentaire