Lorsque l'invitation m'a été faite, j'ai travaillé pour que je trouve de la place dans mon agenda, fort garni ces temps ci ! Il y avait deux programmes et j'avais dit oui aux deux, mais au final, c'est seulement à la deuxième que j'ai pu assister ! Et en voilà de mes impressions suite à "ma première fois", mais pas la dernière (!) à la rencontre des créations des étudiant.es de la cohorte de troisième année en danse contemporaine de l'Université de Concordia !
Crédit Liam Gover, tirée du site de l'évènementUne fois passé d'est en ouest de la ville, j'entre d'abord dans le hall du Hall Building. Ce passage fait émerger en moi des souvenirs lointains, celui de mes présences à "The Names of Dancers (this is swallowed by neoliberalism or else fades into obscurity". C'était, il y a dix ans ! Le principe était "simple", un.e artiste en danse effectuait une performance non annoncée et presque dans l'anonymat dans ce hall, avec la vie "normale" tout autour. J'y ai vu entre autres, Caroline Gravel, Adam Kinner et Lara Kramer. Expériences fort riches et singulières dont j'ai laissé des traces sur ce blogue (pour les intéressé.es !).
Bon, le hall traversé, je me rend à l'entrée de la salle de présentation où je rencontre Pierre-Marc Ouellette, le prof de ceux et celles qui nous présenteront leur travail. Une fois les portes de l'auditorium ouvertes, je me dirige à "mon" siège en première rangée et une fois que le tout débute, je serai le seul spectateur dans cette première rangée ! Mais bon cela est accessoire, Robert ! Poursuis s.v.p. !
Ainsi donc au programme, quatre propositions dont la première débutera après les paroles de présentation et de reconnaissance de territoire prononcées par deux des élèves de cette cohorte. Il s'en suit "Tracing" de Lucie Eloïse Beylard interprétée par Celine Blais, Mia C. Periera, Maria Morin et Rena Adell Eyamie. Arrivent graduellement les quatre interprètes, sans oublier les passages tout au fond de cette ombre, qui dans ce qui suivra seront seules, à deux ou en groupe. Je découvrirai des interactions harmonieuses avec des gestes en courtepointe, soit des gestes en couverture et des intentions en "rembourrage" ! Devant moi, j'y vois clairement ce qu'indiquait la dernière phrase du descriptif soit "Le mouvement se déforme à mesure que les limites de sa fonction sont trouvées, perdues, puis retrouvées, peut-être avec une nouvelle fonction." Et moi dans ce "peut-être", j'y trouve aussi une ouverture fort éclairante pour ma perspective, soit une poésie des corps avec une certaine légèreté réconfortante!
Il s'en suit, "Obsidian Bloom" de Michelle Shuman, interprété par Laurie-Anne Gosselin et Camille Courchesne-Couturier. Avant de débuter des "objets" sont mis au devant de la scène, juste devant moi ! Le moment venu, les deux interprètes, déjà là étendues par terre, se lèvent pour entreprendre leurs interactions. Si le texte de présentation indiquait dans la dernière phrase, "À l'image d'une pâte que l'on étire et morcelle, les interprètes se fondent et se séparent, négociant l'expérience d'un tout invisible tout en affrontant leur irréductible singularité", mon interprétation de ce que je découvre diffère quelque peu. Moi, j'y vois deux corps immergés dans des eaux profondes, des sirènes peut-être ? (la trame musicale m'amenait à cette perspective !), tout en ondulations, qui sont forcées à aller au bout de leur destin pour prendre pied sur terre. Et leur arrivée se fait difficile, percutante, sinon fracassante, dévorant les fruits, oups !, les fleurs de leurs efforts avant leur repos final !
Après une pause durant laquelle le rideau se ferme pendant un certain temps et puis s'ouvre, pour nous permettre de découvrir "Fenêtre de ma mémoire" de et avec Malika Bouchard-Medawar (appuyée par Arezoo Mohadjeri), accompagnée sur scène par Maria Marsli. Le rideau donc s'ouvre sur un écran qui manifestement nous présente des moments du passé ( ce que le programme de présentation me confirmera après !). De ces corps qui ondulent, dos à dos, je ressens dans le silence, les liens qui unissent ces corps, tout autant dans leur séparation que dans leurs retrouvailles avec une finale tout en danse. Et cette intention exprimée (dans le programme), soit de rendre "hommage à celles qui ont traversé les époques et les continents, portant avec elles des identités et des mémoires en perpétuelle évolution.", je l'ai bien ressentie !
Et pour compléter ce programme déjà fort intéressant, "Le silence du monde" de Santiago Lopez Alzate, interprétée par Valeria Ortiz, Henry Richa et Ro Paloma.
Pause
Je me souviens encore, c'était lors de ma présence à "Vous êtes ici" coprésentée par la gang de "LA SERRE - arts vivants" et le Théâtre Aux Écuries, Santiago Lopez Alzate nous avait présenté "ELIMINATE THE THREAT", présentée comme une "œuvre qui explore le potentiel chorégraphique du corps avec les frontières". Sans trop prendre de l'avance dans ce texte, la thématique de la frontière sera une fois de plus au coeur de la proposition à venir !
Fin de la pause
Avant que le tout débute, sur un grand écran derrière, sont projetées des indications dont la plus importante est d'ouvrir sur son cell l'application "Instagram". N'ayant pas de téléphone mobile (oui, oui !!!!), je pressens qu'une partie de ce qui suivra m'échappera. D'autant plus que je vous rappelle que je suis seul dans "ma" première rangée.
Le tout débute l'arrivée des trois interprètes, chacun de son côté de l'espace scénique ! Il y aura les bruits de bouche de l'un d'entre eux. Il en reste que c'est de côté cour que ce qui se passe m'intrigue le plus. Il s'en suit leurs actions à trois dont le son me provient de devant, mais aussi de derrière, des téléphones des spectateurices. Et puis un part, puis un deuxième et enfin la troisième, plongeant le lieu du "fracas" au silence et laissant la scène tout vide. Un regard en arrière m'indique que c'est sur leur écran que les gens assistent à la suite de l'oeuvre. Et pour moi, est ce la fin avec seulement le son des autres à entendre. Mais non, parce que voyez-vous, une spectatrice constatant ma "solitude", vient vers moi et partage son écran. Ce qui me permet de découvrir la dernière interprète dans le hall du Building désert. Merci à toi pour ton partage, dit le spectateur reconnaissant !
Ainsi donc Santiago Lopez Alzate, encore une fois, explore la notion de frontière et cette fois de façon fort originale. Il le fait de deux façons, soit en sortant la performance de territoires habituels et aussi en faisant éclater la réception d'une oeuvre d'une dimension collective à une autre, individuelle. Comme l'est, la tendance actuelle. Et ceux qui résistent à ne pas avoir ce bidule mobile (dont moi, par principe !), risquent de rester sur la touche !
Le tout se termine avec l'arrivée sur scène des différents artistes chaleureusement applaudis. Et moi, je repars fort heureux et satisfait, avec mon programme papier en main, me faisant la promesse qu'il faut que je revienne l'an prochain !
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