Lorsque je tente d'expliquer comment certains univers créatifs m'ont demandé du temps pour les apprivoiser et de donner des exemples, je pense assez vite à Maria Kefirova. Je me souviens encore et très viscéralement de mon départ "furax !!!" suite à la présentation de son "The Paradise". Par la suite à ma présence à "Studio libre" (mai 2016), je me souviens de ce que j'avais écrit, " Comme pour sa dernière présentation à Tangente, "The Paradise", je dois avouer que je suis resté quelque peu dubitatif devant ce qui m'a été présenté, même s'il y avait là, une prémisse intéressante. Quand même curieux d'en voir la suite prochaine ou lointaine, de cette exploration.". J'y détecte avec du recul, une ouverture, toute petite, mais réelle.
Photo de Maria Kefirova par Frederic Chais & Svetla Atanasova
Intéressant de noter mes réactions plutôt négatives face à ses propositions, fortement colorées d'éléments rationnels, moi le scientifique. Mais avec "The only reason I exist is you, also why dogs are successful on stage", toujours en 2016, le vent avait tourné et j'avais été séduit et surtout conquis par son univers cérébral, envoûtant (dans le sens de subjugant !). Le spectateur se répète, mais, c'est pour les bonnes raisons, "il faut apprendre à manger du brocoli" !
Ainsi donc, je me suis retrouvé dans le hall d'entrée, fort achalandé du Théâtre La Chapelle pour découvrir sa plus récente création, "The Nutcracker", dont j'avais découvert un très court et intrigant extrait lors de la présentation de la saison de ce lieu de présentation. "À ne pas manquer", que j'avais noté dans mon agenda.
Les portes de salle s'ouvrent devant moi et encore une fois, en première rangée, je prend place, fort curieux. Sur la scène devant moi, je n'y retrouve que quelques accessoires dont un haut-parleur et des micros. Le temps que la salle se fasse comble, nous arrive de l'arrière des estrades, Maria Kefirova, habillée de sa robe rouge et blanche et de sa tuque. Elle s'assoit dos à nous et pendant que nous attendons la suite, nous entendons le son de ses pulsations aux rythmes variables.
Et elle se lève ! Et ce son devient celui de son coeur qui pulse, comme aussi ses pas en résonance. Il s'en suit des tableaux avec une enregistreuse portative et micros qui deviennent une oeuvre abstraite, sinon absurde, mais tout à fait fascinante à découvrir. Quelque soit, la signification des ses mouvements, de ses déplacements, de ce qu'elle veut nous présenter, elle nous garde captif ! Et lorsqu'elle nous ordonne, "Don't look at me", je lui ai obéi sans broncher.
Puis arriva le moment des "noix" (25 kilogrammes, selon le feuillet de la soirée !) , elles servent d'abord à situer le chemin parcouru de son corps sur la scène et en garder la mémoire. De ce long, mais néanmoins court et très intéressant moment, durant lequel, la scène se remplit de noix (de Grenoble), les gestes captivent. Mais de ces souvenirs, et de ces traces passées, que peut-on en faire ? Maria Kefirova, elle, nous en présente sa version. Comme pour faire une omelette, il faut casser des oeufs, les noix subiront le même sort, sous sa "botte" impitoyable déployée dans une danse colorée d'urgence, comme pour fuir et passer à autres choses. Ce qu'elle fera la tâche complétée.
"The Nutcracker" est définitivement, une oeuvre hors norme, abstraite et captivante. qui laisse une forte impression. Et qui pour moi, scelle définitivement la relation créateur-spectateur avec elle !
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