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samedi 23 octobre 2021

Sur mes premiers pas de la saison à l'Usine C: Revoir avec autant résonance "Pour" de Daina Ashbee !

 Peu à peu avec l'automne qui prend ses aises sur la métropole, mes pas me ramènent vers chacune de "mes" salles de rencontres culturelles. En ce mercredi soir, c'est vers l'Usine C qu'ils m'amènent pour revoir "Pour" de Daina Ashbee. De cette première fois au La Chapelle (il y a environ cinq ans !), je n'en avais que de vagues souvenirs et pourtant !!!! Cette fois, c'est à l'Usine C que je reverrai cette oeuvre, portée cette fois avec tout autant de brio par Irene Martinez que par Paige Culley, la première fois.

                                           Crédit: Stéphanie Paillet tirée du site de l'Usine C

Question de ne pas me répéter, je vous repropose ce que j'avais écrit à l'époque.

Avec "Pour", je peux l'indiquer en entrée de jeu, la chorégraphe poursuit dans la même veine, mais en l'ancrant dans "la relation complexe des femmes à leur cycle menstruel", fort justement annoncée comme une oeuvre "alliant force et vulnérabilité", des êtres qui plient, mais qui ne brisent pas. Mais, cette rencontre n'est pas facile, exigeante et interpellante, que l'on soit un homme ou une femme et cela dès le début. 

notre entrée dans la salle, nous devons prendre notre place dans la pénombre. Nous pourrons entendre à intervalle régulier, le temps que chaque siège accueille son spectateur, le cri ou le chant venant d'une forme humaine que l'on peut distinguer avec effort dans le fond de la scène. Ce chant ou ce cri, tel un appel, se modifiera peu à peu. La salle remplie, les lumières s'éteignent complètement et nous sommes là dans l'attente. Le personnage ( totalement investie du début jusqu'à la fin), s'approche tout à coup de nous, soit juste en face de moi en première rangée. Il fait noir, mais elle est là, prenant possession de notre attention et de notre vision, malgré le peu de luminosité entre nous.

Arrive, le moment, la scène blanche rayonne et nos yeux peinent et vacillent à effectuer la transition. S'en suivra une série de tableaux durant lesquels cette femme, sans défense, exécutera des mouvements ou des cris répétés jusqu'à parfois tester sa résistance et la nôtre aussi. Il a été parfois possible de ressentir cet effet dans la salle autour de moi. Les tableaux étant souvent sans enrobage musical, "cet effet de salle", il est difficile de le rater. D'autant plus vrai pour le dernier tableau qui nous oblige à un certain effort de retenue et qui devrait faire jaser "dans les chaumières" !!!. 

Pour ma part, j'ai été particulièrement touché lors des tableaux durant lesquels, elle m'interpellait (OK !, je sais que je n'étais pas seul, mais c'est tout comme !) avec son regard, les yeux grands ouverts, tout aussi affirmés que vides. Je me sentais visé tout en dedans et de respirer, j'en arrêtais presque.

L'abandon de ce corps féminin aux cycles fondamentaux pour que la vie soit, voilà ce que le spectateur homme que je suis a pu découvrir intensément tout au long de ce "Pour". Les pas de retour m'ont permis de revenir sur terre, comblé !

En cette soirée d'octobre, la "magie" de la chorégraphe a encore opéré. 


samedi 5 octobre 2019

Sur mes pas à l'Usine C: Une soirée tout aussi contrastée que "Body Electric"

De celle, Mellissa Larivière, qui me propose des sorties prometteuses (et qui remplissent leurs promesses !) au ZH Festival, j'étais invité à découvrir sa série "Body Electric" à l'Usine C. Deux séries de deux propositions et, pour le bonheur de mon agenda, les deux oeuvres que je ne n'avais pas déjà vues étaient présentées dans le même programme double. Et par conséquent, j'y étais et fort curieux !

Mon arrivée fort hâtive, m'a permis d'être au premier rang de la Petite Salle, pour "Umanishish (ou fœtus d'orignal") présentant sur scène Soleil Launière (artiste innue), dont la performance est amplifiée par les effets visuels de Gonzalo Soldi. Au final de ce cycle de vie que j'ai pu découvrir pendant les 60 minutes de prestations, je me suis dit et j'aurais tant voulu lui dire, "repose en paix, petite soeur !" Parce que, des tous premiers moments durant lesquels elle chante accompagnée de son tambour jusqu'à la finale, où elle nous quitte, son chemin s'avère difficile.

Au tout début, sortant de l'ombre de la nuit, la voix prend le temps de faire sa place et nous, nous sommes témoins de sa "naissance" et des prochains pas qu'elle fait. Il y aura ce moment fort troublant, et mon préféré, durant lequel le sang dont elle s'abreuve corporellement est un symbole de souffrance. Il y a aussi celui, en finale, durant lequel, derrière une toute petite ampoule, sa voix me subjuguant, je découvre derrière elle, l'effet lumineux s'amplifiant d'abord pour peu à peu disparaître.

Présenté par les artistes de l'oeuvre, "Umanishish est un appel au courage et à la résistance contre les ennemis contemporains de l'humanité !" Une fois cette toute petite lumière éteinte et toutes les autres allumées, sauront nous l'entendre cet appel, mais surtout, y répondre. Soleil, sache que pour moi, tes pas sauront me guider et pour cela merci, "petite soeur" !

                                          Photo de Soleil Launière tirée du site de l'Usine C

Le temps de revenir au moment présent, mes pas se dirigent, un étage plus haut, afin d'attendre pour prendre place dans la Grande Salle en mode intime, cette fois pour découvrir "Untitled I + III" d'Andrea Pena & Artists.

                                          Photo de David Wong tirée du site de l'Usine C

J'ai, dans le titre, indiqué que cette soirée était contrastée, parce que voyez-vous, elle l'était ! Si la première oeuvre se déployait à partir de l'ombre, la deuxième le faisait dans la lumière. C'est donc dans la grande salle, dépouillée de tout artifice, sinon le mur de briques tout en arrière.

Une fois, tous les spectateurs en place, nous arrive du côté de la scène, un homme (François Richard), qui se dévêt de ses vêtements pour ne garder qu'un cache sexe. Il s'en suit sous la lumière blanche, vive et toute crue, une suite de mouvements qui je dois l'avouer m'a surpris et dont le propos m'a échappé au départ et qui m'a échappé jusqu'à la toute fin. Il en reste que de cette proposition sans titre, d'abord en solo et ensuite en trio (François Richard, rejoint par Jean-Benoit Labrecque et Kevin Delaney( (comme le titre l'annonçait !), j'en ai ressenti un trouble face aux gestes fort percutants et aussi à ces regards fort déterminés vers nous. Particulièrement touché par ces corps qui roulent "sans fin", comme nous, de façon allégorique, abordons notre quotidien ! Il y a dans cette impassibilité exprimée, une touche et une exigence Daniel Léveillé, qui demande un apprivoisement. Mais comme l'oeuvre dure près de 90 minutes, elle le permet ! Une oeuvre qui me rend fort admiratif face à ces hommes à qui ont demande des efforts physiques fort évidents que la sueur témoigne de façon fort éloquente !

Andrea Pena nous propose une oeuvre politique colorée de vulnérabilité. Si son intention m'a échappé, ses gestes, eux, m'ont rejoint "totalement" dans mes trippes !

C'est avec ces deux oeuvres toutes différentes en tête que j'ai quitté l'Usine C et qui m'ont accompagnées dans la nuit d'un automne tout sombre. Ce qui m'a permis de méditer sur la perspective artistique face aux lendemains troubles qui nous attendent.




vendredi 22 février 2019

Sur mes pas en danse: Un surprenant programme double à l'Usine C !

Je ne saurais dire si j'avais déjà vu une oeuvre de Jan Martens, parce que pas de traces retrouvées dans ma mémoire, ni non plus écrites. Mais, son nom m'était assez connu pour me procurer un billet et me rendre à la première de son programme double à l'Usine C. "Bis" et "Ode to the Attempt", les œuvres au programme qui seront chacune d'une trentaine de minutes, avec un entracte presque aussi long. Ce qui est assez difficile à comprendre avec une scénographie en apparence aussi simple, avant et après, mais bon !!!!

                                                Jan Martens par Phile Deprez tiré du site de l'Usine C

Ainsi donc, dans la grande salle de l'Usine C, nous prenons place devant cette grande scène toute vide. Et puis arrive, ce que je croie être lui, mais qui s'avère être elle, Truus Bronkhorst. À ma défense, ses vêtements et son allure androgyne m'ont déjoué. Elle débutera en inscrivant à la craie sur la scène, trois injections, la première, trois fois, la deuxième, deux fois et enfin une dernière, une fois. Trois injonctions ou "principes de vie" qui peuvent s'adresser à nous et qui comme la suite le montrera, pourront au contact de l'autre, peut s'effacer de notre parcours de vie.

Mais une fois, les injonctions partiellement effacées et délestée de ses vêtements, vêtue de son seul maillot, que lui est-il possible de faire ? Et c'est là, que nous serons interpellés, surpris aussi ! Parce que le tout prend une tournure, au propre comme au figuré qui m'interpelle au propre et qui me déstabilise au figuré. Cette femme se fera hymne à la détermination, à l'affirmation, mais aussi à la résilience. Tout cela, dans une simplicité désarmante laissant exposé son authenticité. Au final, difficile de se faire une impression nette de cette rencontre. Et bizarrement, je me suis posé intérieurement cette question (et que je vous partage), "Y a-t-il des œuvres qui sont faites pour ne pas être applaudies ?", sans manquer de respect pour l'interprète, évidemment !!!

Une fois le tout terminé, nous sommes invités à quitter la salle pour l'entracte qui s'est avéré dans mon système de référence temporel personnel, très long (!) et dont la fin a été annoncée par le son de la cloche.

A notre retour en salle, Jan Martens est déjà là, assis derrière sa table sur laquelle on retrouve un ordinateur et une console (qui contrôlera tous les aspects de la suite). Il nous observe arriver tout en effectuant certaines tâches. Une fois tout le monde rendu à sa place, il s'adresse à nous et inscrit sur le grand écran derrière la scène, treize titres fort énigmatiques qui présentent, nous le découvrirons plus tard, les treize parties de son oeuvre, dont "Tentative de mieux le définir". Certaines de ces parties qui seront accompagnées des huit pièces musicales, qu'il sélectionnera devant nous et qui par conséquent, je peux prendre en note, dont la percutante et appropriée "Bloody Mother F***Ing A**Hole"  ou "BMFA"de Martha Wainwright.

Le tout s'avère fort surprenant, drôle aussi, mais surtout d'une simplicité qui s'avère fort efficace. Il s'adresse simplement à nous, en toute honnêteté, avec de petits faux pas techniques qui rendent la rencontre fort chaleureuse. Et lorsqu'il entreprend des mouvements de danse au son de la guitare Pat Metheny, avec des "Selective Conterpoint" de "Electric Conterpoint (de Steve Reich), je suis tout à fait comblé, qui s'est avéré mon tableau coup de coeur !

Une première rencontre, peut être, toute simple et fort belle qui méritait le temps pour la faire. Et mes pas ont accompagné un spectateur fort satisfait à son retour à la maison !

samedi 26 janvier 2019

Sur mes pas en Danse-Théâtre: Ébloui par la magie de "The Great Tamer" !!!

Lorsqu'en début d'année culturelle (en septembre), les billets s'accumulent au gré des forfaits, il est souvent difficile pour moi de savoir, quels seront les moments forts à venir, d'autant plus si les oeuvres au programme viennent d'ailleurs, comme c'était le cas pour "The Great Tamer" de Dimitris Papaioannou présenté à l'Usine C. Il en reste que j'étais probablement le seul à ne pas savoir, parce que les billets se sont envolés vite et une supplémentaire s'est ajoutée.

Ainsi donc le hall d'entrée était fort achalandé et riche en personnalités ("tout le gratin y était", comme le disait, une amie) pour cette première qui s'est avérée la "deuxième" puisque la supplémentaire a été présentée avant ! Et, moi, j'étais fort heureux de mon choix !

Une fois les portes de la salle ouvertes, chaque place a évidemment trouvé preneur, malgré la température extérieure difficile et des trottoirs fort bien garnis d'un fond de glace. Pendant ce temps, sur cette inclinée, juste devant nous, il y a un homme en habit, qui se lève et qui debout, pose sur nous un regard fixe balayant la salle, regard qu'il déplacera pour suivre une spectatrice jusqu'à sa place tout devant.

                                                Photo de Julian Mommert tirée du site de l'Usine C

Et arrive le moment de vraiment commencer et pour ma part, de plonger dans un univers onirique dont j'émergerai, sans avoir vu le temps passer, une centaine de minutes plus tard. Une suite de tableaux qui me "parleront" dans un langage onirique de la vie et de la mort. Rarement, je réagis pendant la présentation d'une oeuvre, mais cette fois, ce fût assez souvent (mes plus sincères excuses à mes voisins de salle !). Les images se succèdent, parfois simultanément en différents endroits sur la scène, me demandant de déplacer mon attention, mais peu importe l'endroit où je porte mon regard, il a de quoi me nourrir l'esprit. Mais, intelligence du créateur, j'ai droit à la répétition de certains tableaux, me permettant de mieux les apprécier et de les "digérer" !

Que l'on connaisse ou pas les références historiques et artistiques de certains tableaux, le plaisir est présent. Qu'on soit familier ou pas à ce type de représentation, impossible de ne pas apprécier. À preuve, je me permets de citer des connaissances (Ariane et Olivier) à qui j'avais recommandé cette soirée. Leur réaction représente bien comment un propos universel, habilement amené avec grand talent peut rejoindre un large public même moins familier. "Nous ne sommes pas particulièrement familiers avec ce genre d'expression artistique. Sans en comprendre nécessairement tous les codes, nous avons néanmoins grandement apprécié la créativité et la sensibilité de ce spectacle. Papaioannou nous dépeint avec une grande poésie notre humanité dans tout ce qu’elle a de plus fragile et précieuse. Pour raconter cette histoire, il présente des corps nus, fragmentés ou même trépassés. Ces corps qui nous ramènent inévitablement à notre propre humanité et à notre propre finalité."

De la fin de leur retour, j'y trouve la raison de sa force et de son succès. Mais difficile de ne pas remarquer la remarquable et inventive scénographie qui d'abord nous surprend, pour ensuite nous révéler des effets plus grand que nature. Difficile de ne pas être estomaqué devant la scène de naissance en fin de programme ! L'oeuvre nous est arrivée rodée et les interprètes sont en parfait contrôle. Leur prestation est athlétique, rehaussant l'effet ressenti. Une soirée qui a mis devant moi des moments forts avec des images fort marquantes de la vie et de la mort issus de l'imagination d'un grand créateur et de son équipe.





vendredi 2 novembre 2018

Sur mes pas à la radio: Mon point de vue de spectateur face à "Fléau" d'Alex Huot et Dave St-Pierre

Pour ma chronique du 2 novembre à "Danscussions & CO" sur CHOQ.CA, je partageais mon expérience de spectateur suite à ma présence à "Fléau" d'Alex Huot et Dave St-Pierre. Un témoignage court, j'en conviens, mais, qui au final indique bien, ce que cette expérience fût pour moi. Je vous le redonne ici.

                                          Photo d'Alex Huot

Mais, je voudrais revenir sur ma sortie à l’Usine C dans le cadre du Festival Actoral, pour assister à « Fléau », une œuvre de cinq heures d’Alex Huot et Dave St-Pierre. Comment arriver à aborder ce type d’œuvre avec vous ? Et bien, entre autres, en mettant mes espadrilles, partir courir et revenir 15 kilomètres plus tard pour me permettre d’aller au bout de ma réflexion. Parce que voyez-vous, si cette œuvre m’a demandé d’y mettre temps et quelques efforts pour la découvrir, elle mérite aussi du temps et des efforts pour murir mon propos.


Quiconque suit les pas sur scène de Dave St-Pierre seul d’abord et ensuite avec son complice Alex Huot, sait que le temps est un paramètre fort élastique qu’ils aiment étirer jusqu’à la limite pour magnifier la force du symbole et l’esthétique du moment. Je me souviens encore très bien du propos de Dave St-Pierre avant la présentation d’une ébauche de création dans une Maison de la Culture qui revendiquait le droit aux créateurs de prendre le temps quitte à faire démissionner certains, sinon même la majorité des spectateurs, avant le début des vraies choses. Je me rappelle aussi, de « La Pornographie des âmes » et « Un peu de tendresse, bordel de merde » qui me demandaient de ressentir jusqu’à la limite, ma limite, le malaise devant différents tableaux. Peut-être maso le spectateur, peut-être pas, qui sait ! Mais il y trouve son compte et revient.

Voilà donc pourquoi, je me retrouvais au début d’une très longue file d’attente pour découvrir « Fléau » et ses épisodes de vie déclinés en 5 heures. J’étais averti, « Les spectateurs s’attendent beaucoup à répondre à certains types de codes, et à ce qu’un spectacle réponde à certains types de codes. On devrait avoir le droit de les briser. C’est pour ça qu’on fait Fléau. » dixit Alex Huot et que j’avais pu lire dans le Devoir. Mais ceux et celles autour de moi qui rempliront « full » la grande salle de l’Usine C, que viennent-ils chercher ? Ce groupe de jeunes hommes et de jeunes femmes dans la vingtaine, cette femme avec sa grosse valise qui lui sert de sacoche (merci Catherine Lalonde pour l’info !) ou ce spectateur derrière moi qui me disait que c’était une première fois pour lui, pourquoi font-ils la file avec moi ? Je ne saurais dire.

Et moi, qu’est-ce que je viens chercher ici ? La réponse "expérientielle" n’est pas simple, peut-être même pas traduisible en mots. Mais je tente le coup. Tout au long, les différents tableaux riches en symboles et intenses de leur intensité qui perduraient sans trop d’enrobage, m’ont forcé à lâcher prise et ouvrir ma conscience, comme l’aurait fait un sauna avec les pores de ma peau. Cette façon de m’interpeller, de me bousculer et de m’amener dans un état d’inconfort, de déséquilibre, moi, je trouve cela important, sinon essentiel pour mon propre équilibre. C’est comme si je cannibalisais leur intimité, réelle ou imaginée, pour m’en nourrir.

« Fléau » a donc été pour moi, une rencontre humaine inconfortable et troublante, mais forte et essentielle.

dimanche 3 décembre 2017

Sur mes pas en danse: "Some hope for the bastards" pour mon bonheur de spectateur.

Il m'arrive de prendre des chances et à ce jeu, je gagne et aussi, je perds. Cette fois, j'ai gagné et voilà pourquoi mes pas m'ont porté jusqu'à l'Usine C pour la reprise de "Some hope for the bastards" de Frédérick Gravel après son récent passage au FTA que je n'avais pas choisi. Cette oeuvre au programme pour deux soirs (seulement !), remplissait de spectateurs le hall d'entrée d'abord et la grande salle, ensuite. Comme quoi, je n'ai pas été le seul à avoir espéré une reprise de l'oeuvre pour la voir ou la revoir.

                                                       Photo de Stéphane Najman tirée du site de l'Usine C

Les portes de la salle s'ouvrent et je me dirige à ma place, première rangée. Chemin faisant, j'aperçois sur scène les interprètes très "relax" et j'en croise un qui me serre la main, voilà bien la façon de faire "Gravel style" avant le début d'une représentation. La salle se fait comble, certains spectateurs se font offrir une bière, d'autres, sûrement, jalousent les heureux élus. Arrive le temps de commencer, pendant que les lumières restent ! allumées, mais que les neuf interprètes (David Albert Toth, Dany Desjardins, Kimberley  de Jong, Simon-Xavier Lefebvre, Louise-Michel Jackson, Alanna Kraaijeveld, Alexia Martel, Jamie Wright et Riley Sims) se mettent en place pour le tableau d'ouverture. À tour de rôle, ils viendront "prendre" place pour nous observer, les lumières de la salle toujours toutes allumées. De la première rangée, l'effet est fort troublant et surtout réussi pour cette "rencontre du premier type".

Mais, ne voilà tu pas qu'arrive le chorégraphe et deux musiciens qui sont, en fait trois, puisque lui aussi le sera pour la suite. Pas avant, nous avoir adressé la parole, la seule fois de la soirée, avec un discours "philosophique" de son crû dans lequel légèreté et ironie s'amalgame avec intelligence du propos. L'oeuvre se remet en mouvements avec un deuxième début, tout différent et ça sera à nous de choisir notre début. Pour moi, le premier l'emporte "haut la main"! Par la suite, avec toujours ce fond immense musical intense (avec bouchons pour les oreilles sensibles), les mouvements sont forts éloquents et illustrent des pans non avouables de notre "société du paraître" en constante évolution (comme les vêtements des interprètes) dans laquelle la violence, sinon la brutalité imposent leur  présence.  Et quand, nous, spectateurs, sommes "pompés", il crée la cassure, au propre comme au figuré, nous laissant en plan. À nous de décider ce que l'on en fait de ce vide, de cette césure fort éloquente, mais aussi désarmante !

Le tout reprend sur le malaise, sur qui repose le "Gravel" de la fondation de l'oeuvre. S'en suit des mouvements fort éloquents  jusqu'à ceux, colorés d'immobilisme que j'aurais acceptés pour finaux, mais le chorégraphe me déjoue et il finit le tout avec un tableau qui est d'une puissance à en épuiser même les spectateurs.

Ravi de cette proposition, je salue bien bas de mes applaudissements pour le propos et la performance des danseuses, des danseurs, des musiciens et du chorégraphe de cette oeuvre que j'ai décrit par un mot à ma sortie de la salle, "vibrante!" dans le sens qu'elle résonne en moi.

jeudi 2 novembre 2017

Sur mes pas en danse: "Vice Versa" et "Serpentine" quand la "femme" s'expose !

C'est une soirée comme les autres, sinon que les petits (et plus grands aussi) monstres envahissaient nos rues en ce dernier jour d'octobre. Si les monstres rencontrés en chemin étaient assez peu perturbants, il n'en était pas de même du propos qui nous sera présenté pour le programme double à l'Usine C, avec "Vice Versa" de la Cie Mossoux-Bonté (la chorégraphe Nicole Mossoux et le metteur en scène Patrick Bonté) et ensuite "Serpentine" de Daina Ashbee. Une soirée en deux temps, aux tons différents mais sur un propos commun, celle de la violence au féminin.

                                         Photo de Mikha Wajnrych tirèe du site de l'Usine C

D'abord, tout subtilement et douceur, deux femmes ( Frauke Mariën et Shantala Pèpe) nous apparaissent tout au loin (au fond de la scène de la grande salle). Et c'est d'abord de là, au chant ou plutôt de la complainte médiévale, "Les anneaux de Marianson", interprétée par Michel Faubert qu'elles se mettent en mouvement avec des gestes harmonieux, tout en phase. Puis, peu à peu, subtilement, elles s'approchent de nous et de moi, tout proche, assis au milieu de la première rangée. Et de leurs mouvements me captivent, me permettant difficilement de porter attention au sort de l'héroïne de la complainte. De ce couloir lumineux, tout à coup, elles s'en écartent, comme si le destin défaillait et que sur scène la libération de la "belle" se faisait. Mais c'est ensemble et en phase qu'elles termineront ce moment.

Au final, un trop court moment durant lequel la douceur du gestes rehaussait la dureté du propos, démontrant que l'on peut se rendre à notre intellect comme le présentait Aristote, "rien n'est dans l'intellect qui n'ait été d'abord dans la sensation". Et cette "sensation" fût fort efficace, comme la suite de cette soirée le sera d'ailleurs. 

Après les applaudissements mérités et invitation à quitter la salle, nous attendons la suite à l'extérieur. 

Le spectateur informé sait déjà que la prochaine oeuvre, "Serpentine" de Daina Ashbee sera constituée de trois répétitions de la même performance. En entrant, il est informé qu'il doit prendre place assis par terre ou assis sur une chaise ou debout derrière ces mêmes chaises, tout autour d'une allée enduite d'huile, sans évidemment y mettre les pieds. Et s'il quitte durant la présentation, il devra le faire de façon discrète. Je prends donc place prudemment sur une chaise et découvre au bout de cette allée, le corps replié, face à terre, d'une femme nue (Areli Moran, impressionnate). Une fois, la foule nombreuse correctement installée et le silence obtenu, nous découvrons que cette femme peut bouger, d'abord de façon subtile dans le silence le plus complet. Et tout à coup, la musique d'un orgue se fait entendre, colorant le moment d'une chape de rituel. Et presque toujours face contre terre, cette femme avance. Sa démarche semble difficile, douloureuse, jusqu'à devenir insoutenable, pour elle et  pour nous, au point de se faire violence. Une fois son "chemin de croix" complété, elle se redresse, nous permettant de reprendre notre souffle. Et tout prudemment, le premier cycle terminé, elle revient à l'endroit initial où, nous l'avons découvert. Le premier cycle complété, c'est un tiers de la salle qui quitte. Cette oeuvre a beau être annoncée comme la répétition d'un même tableau, il en reste que la seule façon de le savoir est de rester et c'est ce que je fais. Parce qu'un corps qui souffre, qui s'offre et surtout qui offre sa souffrance mérite qu'on la suive jusqu'au bout et surtout dans les nuances qu'il nous montrera. Et des nuances, il y en aura, que ce soit de ces mouvements de violence encore plus importants ou des sons qu'elle émet durant. Il y aura aussi une sédimentation de nos couches d'inconfort que seule la répétition peut amener. Et de cette compréhension de la douleur amenée par cette violence faite aux femmes, je recite Aristote, "rien n'est dans l'intellect qui n'ait été d'abord dans la sensation". 

                                         Photo d'Adrian Morillo tiré du site de l'Usine C

Une fois la deuxième fois complétée avec ces nuances, un tiers des spectateurs restant quitte à son tour, laissant l'espace encore intime pour cette troisième fois qui pour moi, a résonné plus fort, parce qu'une fois la surprise de la découverte passée, il m'a été possible d'entrer en communion (terme, je le concède est un peu exagéré, mais le plus proche de ce que j'ai ressenti durant ces derniers moments) avec cette femme sans défense, contre elle-même surtout.

Une fois terminé, discrètement, elle quitte la salle, suivie par la chorégraphe et sans jamais revoir, ni l'une, ni l'autre, les applaudissements, cataplasmes imparfaits pour les spectateurs écorchés eux aussi, se font entendre. Je suis d'opinion que cette oeuvre se doit d'être vue en entier pour que résonne en nous ce message. 

Avec "Serpentine", Daina Ashbee peaufine, tout en simplicité et en efficacité, son exploration de l'univers féminin exposé à une violence qui devrait nous interpeller. Et elle mérite toute notre attention.


lundi 16 octobre 2017

Sur mes pas au théâtre-danse: Ma rencontre troublante avec un narcissique

Par une belle soirée d'automne, mes pas m'ont porté à la rencontre d'un personnage. Rencontre qui sera appuyée par un propos chorégraphique avec des interprètes que j'aime bien. Voilà donc pourquoi, je me suis retrouvé, première rangée, pour assister à "Last night I dreamt that somebody loved me" d'Angela Konrad avec Éric Bernier et les danseurs-interprètes Marilyn Daoust, Nicolas Patry, Sébastien Provencher et Emmanuel Proulx.

                                          Photo de Le Pigeon tiré du site de l'Usine C

Dans cette grande salle de l'Usine C, j'ai donc fait la rencontre d'un homme dont le narcissime n'a d'égal que le propos qu'il nous propose sur différents tons. Une rencontre qui, au début, s'est avérée difficile, sinon quelque peu pénible, parce que cet homme n'est pas particulièrement sympathique et il n'a aucune intention de le devenir. Ses propos qui ont, au début, des allures de logorrhée verbales et dont la logique s'avère, en entrée de jeu, assez difficile à bien saisir. Mais, comme il m'est arrivé d'autres fois dans la vie, nous nous sommes apprivoisés. D'abord, par les propos qui se répètent et qui me permettent de saisir l'essence sur sa perspective de la vie et de sa relation avec les autres. La répétition du propos est pour moi, une des forces de ce texte. Pour appuyer sa relation avec les autres, il nous interpelle souvent directement, nous spectateurs dans la salle. Il y a aura aussi les "autres", révélateurs de relation, incarnés par les quatre projections de l'autre, trois hommes et une femme, plus interprètes que danseurs.  Il y a dans les nuances de leurs gestes et de leurs regards une illustration supplémentaire chez cet homme du mal-être de sa relation avec les autres. Il semble manifestement à la dérive. Il nous force aussi à réfléchir aux aspects fondamentaux de notre propre bonheur existant ou espéré. Question d'appuyer le propos et faire reprendre notre souffle d'attention, nous avons droit à des chansons (avec les paroles projetées sur un écran) des The Smiths. Un moment fort est le tableau fort percutant et assez drôle, dans lequel, il nous relate sa présence à un de leur concert avec un anachronisme fort approprié sur la confiance aux autres.

Pour cette rencontre, j'étais très heureux de me retrouver tout devant, parce qu'elle avait un caractère tout intime et que la proximité avec cet homme rehaussait. Quand, il vient s'assoir dans la pénombre à trois sièges de moi, c'est comme s'ilme parlait à l'oreille. "Last night I dreamt that somebody loved me" est une oeuvre exigeante qui, pour peu que l'on s'y abandonne, laissera sa marque. Et cela est possible grâce à la performance d'Éric Bernier qui navigue autant dans ses émotions que dans les éléments scéniques, tout en étant capable d'appuyer sa prestation par des mouvements de danse fort agréables à regarder.

vendredi 10 mars 2017

Sur mes pas en danse: "Mille batailles", telle une fine pièce de joaillerie.

Admettez, il arrive que les circonstances méritent que l'on s'y attarde et cette fois, et bien, c'en est une. Aller assister à une oeuvre de danse le 8 mars, Journée internationale des femmes, une oeuvre d'une chorégraphe-interprète, Louise Lecavalier, qui a tout d'une battante et qui a pour titre "Mille batailles".  De ces batailles déjà faites et surtout celles encore à faire pour que les femmes puissent prendre toute la place qui leurs reviennent.

Ainsi donc, aller assister à une prestation de Louise Lecavalier, assis première rangée dans la grande salle de l'Usine C, ne m'a pas seulement permis d'avoir une perspective incomparable sur ses gestes et ses mouvements, mais aussi sur la physionomie, toute déterminée, de l'interprète.

                               Photo André Cornellier

Le tout débute sur un tableau solo de la danseuse qui habillée tout de noir, capuchon sur la tête, qui met de l'avant des mouvements de bras vifs finement ciselés. Le tout est frénétique, mais pour peu que l'on soit attentif, le contrôle est total aussi. Comme il l'était indiqué dans le feuillet de la soirée: "La scène est un ring, un territoire clos et ludique,  se livrent mille batailles extrèmes et éphémères". Et ce ring, il est investi totalement dès le départ et la danseuse, de ses mouvements, "belle" à voir dans sa mission. Ce ring, elle en fera le tour pour l'investir le conquérir et en confirmer son appropriation.

Arrivera son compagnon de danse (Robert Abubo) et ensemble, leurs gestes électriques deviendront électrisants. Impossible de ne pas apprécier ce tableau durant lequel, appuyés tous les deux, tout à l'envers sur le mur arrière tout en bois, et d'y donner son interprétation sur le sens "ni queue, ni tête" de certains combats. Il arrivera un moment durant lequel le capuchon tombera pour dévoiler sa chevelure et la nature toute féminine de la combattante, et même remise, une partie de la chevelure blonde restera sortie et contrastera énergiquement avec le noir affirmé du vêtement. Le tout se terminera simplement par le repos des deux guerriers sans que la victoire finale ne soit acquise. Il faudra certainement un prochain round et la danseuse nous a montré que de l'énergie, elle n'en manquait pas et qu'une suite est possible.

Si cette pièce de joailllerie, composée de plusieurs pièces toute en danse, produit autant d'effet, c'est aussi grâce à l'écrin musical d'Antoine Berthiaume et de son illumination par les éclairages d'Alain Lortie. Quelle belle façon de souligner ce 8 mars que d'aller apprécier une oeuvre d'une de nos plus grandes danseuses, merci madame Louise Lecavalier.

samedi 25 février 2017

Sur mes pas en danse: "Folk-s" s comme dans surprise !

Il y a de ces moments pour lesquels rester à la maison aurait été une bonne façon de remplir mon agenda. Mais si vous avez déjà un billet et que vous apprenez que l'oeuvre est attendue, la case horaire change d'inscription et direction Usine C vous prenez. La réception d'une oeuvre, vous le savez déjà, dépend de la personne qui assiste à l'oeuvre et la mienne était limitée. Par conséquent, lorsqu'après une vingtaine de minutes de présentation de "Folk-S", "will you still love me tomorrow ?", la question est devenue pour moi fort pertinente. D'autant plus que l'un des interprètes, nous informe que la présentation se terminera lorsqu'il y restera un seul danseur sur scène ou un seul spectateur dans la salle. Alessandro Sciarroni, le chorégraphe veut éprouver notre patience et pour ce faire, lui et ses interprètes reprendront, sous différentes variantes, le schuhplatter (danse folklorique de Bavière et du Tyrol). Donc, sur une scène blanche avec comme seul habillement, un environnement musical intermittent, les six interprètes s'exécutent. Le mouvement intéresse au début, mais une fois les vingt minutes passées, je me demande si moi, je resterai.

                                         Photo: Andrea Macchia tirée du site du Devoir

Mais allez donc comprendre, une transition se fait et tout à coup et si la danse continue, moi je m'intéresse aux détails de ses mouvements répétés. Par conséquent, captivé et captif ais-je été jusqu'à la toute fin, par cette oeuvre devenue métaphore de la vie. De ces gestes répétés qui incluent des interactions humaines toutes subtiles et discrètes, ces clins d'oeil pour entreprendre une chose, cette attente de l'autre avant d'aller de l'avant. Par conséquent, mon attention s'est quelque peu détournée de leurs pas, pour me concentrer sur l'interaction des interprètes et leurs gestes à venir. Et question fondamentale, comment, eux persisteront-ils ? Le départ du premier (le chorégraphe) sur le souffle d'un accordéon est un moment fort et très réussi de l'oeuvre. Comme dans la vie, chacun partira et prenons le temps d'apprécier le dernier souffle. Par la suite, chaque départ, comme ce premier, sera effectué différemment par la porte arrière avec une lumière au "bout du tunnel".

Il en reste que lorsque tout se termine, après plus d'une heure trente de présentation, je quitte avec regret mon siège. De cette danse exigeante que j'ai pu apprécier de la première rangée, on y voit une habile représentation de nos routines quotidiennes avec tous les petits détails qui l'enrichissent et la particularise. Et cette routine, elle n'aura de fin que par nos pas dans le tunnel avec la lumière au bout.

dimanche 15 janvier 2017

Sur mes pas en danse: Un début d'année troublant à l'Usine C

Pour mes premiers en danse pour 2017 m'ont amené à l'Usine C pour la co-présentation de ce lieu de présentation avec Les Projets du 3e d'un programme double. Si je m'y suis rendu, c'était pour deux raisons, la première, Andrew Tay que je connaissais la notorioté dans le milieu mais dont je n'avais jamais vu de créations. La deuxième, l'affiche (présentée ici) qui présente les deux artistes de la deuxième partie et dont le regard d'Ellen Furey est venu m'interpellé "droit dedans moi" et sans appel.

                                          Photo: Yuula Benivolski

Voilà donc, je me retrouve dans un hall d'entrée fortement achalandé d'abord et une salle bien remplie ensuite pour découvrir deux oeuvres "performatives" avec plein de gens du milieu ( ceux de la danse contemporaine montréalaise).

Première partie, "You Can’t Buy It (but I’ll sell it to you anyways) SUCKA" d'Andrew Tay. La scène regorge de toutous très sages et de plein d'autres accessoires, sans oublier un androïde tout à droite. L'interprète-chorégraphe se présente simplement et entreprend une série de tableaux qui me surprennent. Si le sens du message m'échappe, l'audace, elle, me laisse pantois. Il y aura ces bandes déroulées qui nous invitent à lui texter "quoi faire". Il y aura bien des gens autour de moi qui prendront leur téléphone et qui s'activeront, mais, impossible pour moi de faire le lien avec ce qu se passe sur scène. Il s'exprime et se dévoile, mais le but de tout cela me reste inaccessible. Au final, une oeuvre abstraite dont le sens du propos m'aura laissé quelque peu dubitatif. 

Après une courte pause, avec "Light At The End Of The Tunnel 2.0", Alicia Grant et Ellen Furey prennent possession de la scène remplie d'accessoires (sans oublier bien d'autres derrières les rideaux) et venant, d'abord, tour à tour nous confronter du regard. Par la suite, elles nous présentent une suite de tableaux dans lesquels les deux interprètes se transforment, nous "manipulent" dans leur univers fort changeant. Pour ma part, j'ai été surtout troublé par ce tableau qui me ramène des années derrière avec le télé-théâtre, "Des souris et des hommes". Le tout se termine avec un tableau ambigu dans lequel les deux interprètes prennent possession d'un lieu et l'investissent par leurs mouvements lents et constants. 

Deux oeuvres qui tiennent plus de la performance que de la danse contemporaine. Deux oeuvres qui me sortent de ma zone de confort et d'intérêt. Deux oeuvres que me rappellent que trop d'accessoires me "cachent" les mouvements, sinon les intentions. 

jeudi 24 novembre 2016

Sur mes pas en danse: "À la douleur que j'ai" sur différents tons

N'ayons pas peur des mots, c'est vers la première d'une première mondiale que mes pas se sont dirigés à l'Usine C (en collaboration avec L'Agora de la Danse). Une oeuvre attendue pour laquelle la foule était nombreuse et la salle "ben pleine". Les lumières étaient encore allumées, lorsque sans crier gare, les six interprètes (Isabelle Arcand, Sophie Breton, Claudine Hébert, Chi Long, Milan Panet-Gigon et Peter Troztmer)  se sont amenés devant nous. Rapidement, parleurs et distraits se sont faits silencieux et attentifs. "À la douleur que j'ai" de Virginie Brunelle débutait sur une pose de photo de famille avec un, assis sur une chaise et les autres tout autour. Que l'on ait lu ou pas le feuillet de la soirée, le thème était annoncé, et il m'était évident que je découvrirais des histoires de famille. Une famille qui tentera de maintenir, à tout prix, les apparences. De cette photo qui fait la première page du feuillet, je serais tenté de dire que cette famille, tout en gestes, porte un "toast" "À la douleur que j'ai" d'en faire parti et d'en célébrer à sa façon son humanité évanescente. Cette sensation semble en accord avec l'intention de la chorégraphe qui associe la douleur avec la nostalgie. Comment maintenir un sentiment ou une sensation, malgré le passage du temps, voilà ce que j'ai pu voir, décliné sur différents tons et mouvements durant les différents tableaux de cette oeuvre. Peut-être que j'ai trop d'imagination, mais de ce qui m'était présenté, j'y retrouvais mes propres expériences familiales passées. Des relations entre deux, observées par les autres ou des tentatives de fuir de l'un contrées par tous les autres, parce qu'une famille, "c'est tissé serrée" !

                                          Photo: Mathieu Doyon

Grand plaisir, j'ai eu, avec la gestuelle caractéristique et épurée de la chorégraphe qui me rejoint particulièrement et dans laquelle j'y voyais l'essentiel des choses exprimées et aussi, presque les pointes (du passé) dans certains tableaux.  Il y a aussi ce tableau du duo qui s'éloigne avec une assymétrie synchronisée qui m'a tout à fait captivé. Il y a ce rythme effréné et cette utilisation de l'ombre pendant que se joue sous un projecteur une joute entre deux protagonistes.

Depuis ses premières oeuvres que j'ai vu d'elle, Virginie Brunelle, il me semble qu'elle délaisse peu à peu cette force brute pour une autre plus simple mais tout aussi puissante pour illustrer son propos toujours aussi pertinent et qui sait viser le vif de la chose.

Peu de soirées encore pour s'y rendre, mais j'en suis certain, ce ne seront pas les seules représentations. Restez à l'affût pour vous y rendre et pour moi m'y rendre de nouveau.


dimanche 16 octobre 2016

Sur mes pas en danse: de souvenirs et d'intimité avec "Hunter"

Lorsque mes pas m'ont amené jusqu'à l'Usine C pour assister à "Hunter" de Meg Stuart, j'étais averti. Grâce à Catherine Lalonde (Le Devoir du 14 octobre), je savais que l'oeuvre que j'allais découvrir serait "dense et exigeante". Je dois l'admettre que contrairement à bien d'autres, j'aime lire les critiques sur une oeuvre que je vais aller voir. S'il m'arrive parfois de le regretter, cette fois, comme la plupart du temps, cela me prépare mieux à apprécier ce que je verrai. C'est d'autant plus vrai que ma condition psychologique, et physique aussi, ne mettaient pas toutes les chances de mon côté pour maximiser ma réceptivité et mon appréciation éventuelle. Mais bien préparé à cette rencontre, elle s'est très bien passée et pour cela, merci, Catherine Lalonde !

Il en reste que de cette chorégraphe, j'en connaissais le nom et de vague souvenirs d'une ou deux oeuvres que j'avais vues d'elle. Il en reste que les minutes précédant le début de la présentation m'a permis de constater l'importance de cette grande dame et que sa rencontre allait être importante, parce que de chorégraphes et interprètes, les sièges de spectateurs en regorgeaient.

                                         Hunter / Meg Stuart / Damaged Goods
                                                        Photo / © Iris Janke



Dès mon arrivée dans la salle, je prend place en première rangée juste derrière la chorégraphe-interprète. Elle est assise, dos à moi, bricolant un collage qui de ma perspective semble un empilement d'images-souvenirs qui est projeté sur l'écran en arrière-scène. Comme bien souvent dans la vie, certains de ses souvenirs s'envolent en fumée et ne laissent de trace que les volutés de cendres rapidement dissipées. Je dois avouer que dès ce premier tableau, j'ai été touché à un endroit peu habituel. En effet, si les oeuvres, normalement, me touchent le coeur ou la raison juste après les yeux, cette fois, celle-ci semblait se diriger quelque part ailleurs. Où me demanderez-vous ? Impossible de le préciser, mon corps et surtout ma tête recèle, même pour moi aussi, des zones inexplorées. Il en reste que j'avais l'impression, dès cette introduction que "Hunter" me présenterait une chasse aux souvenirs, des souvenirs qui s'empilent, des souvenirs qui nous échappent. des souvenirs qui nous laissent des traces même une fois oubliés, comme des pas sur le sol ou dans la neige. De souvenirs aussi que l'on conserve précieusement quelque part en nous et ses souvenirs conservés n'étant pas les plus importants, ni les plus significatifs. Et la suite m'a montré que j'avais raison. Aussi des souvenirs qui, allez donc savoir, ont choisi de nous choisir. Voilà un des messages que cette femme qui a vécu m'a transmis tout autant en gestes qu'en paroles tout au long de ces 90 minutes de sa présence sur scène, parfois tout à côté de moi, me jetant un regard ou eux, j'en suis convaincu.
Pour cela, elle a utilisé des mouvements tout simples, des accessoires plus ou moins complexes, des vêtements plus ou moins surprenants, dans une oeuvre "exigeante et dense", merci Catherine de m'en avoir averti. Pas toujours facile de la suivre, exigeant, mais toujours captivant. Lorsqu'une personne d'expérience s'ouvre à nous, comment peut-on rester indifférent ?

Au final, je ne saurais dire si j'ai aimé, mais pour tout l'or du monde, je n'aurais pas voulu être ailleurs. Cette femme s'est "offerte" et quelque part en moi, en zone inexplorée, elle a ouvert de nouveaux chemins.

lundi 5 septembre 2016

Sur ma prochaine saison en danse: Occupée et prometteuse

Voici un des moments difficiles de l'année, celui durant lequel, je dois tenter de tout rentrer mes sorties danse en "harmonie" avec mes quelques autres activités. De m'être mis à la course à pied, pour faire plus et plus vite dans ma vie, ne règle pas mes problèmes de congestion d'horaire. Il y a des semaines pour lesquelles, les choix difficiles seront de mise et des oeuvres laissées de côté (jusqu'à une prochaine présentation !).

D'autres, dont François Dufort sur son blogue de DFdanse, présenteront un calendrier complet des oeuvres présentées dans les principaux lieux de diffusion et je leur laisse cette place. Je me permettrai, cependant, d'ajouter sur un prochain texte sur ce blogue, certaines propositions tout à fait gratuites des Maisons de la Culture de la Ville de Montréal. En danse, voilà une porte d'entrée fort intéressante, sans risque financier, et les incertains, même pas audacieux, devraient s'y intéresser. Il y aura aussi les Passerelles de l'UQAM, premiers pas pour certains chorégraphes/ interprètes et qui permettent au spectateur avisé de prendre en note des noms pour plus tard. Sans oublier, ces invitations qui nous arrivent sans crier gare pour découvrir des présentations, dans des lieux inhabituels pour le spectateur que je suis, résultat de premières étapes de création. Donc dans l'agenda, il faut laisser de la place et surtout ne pas remettre aux lendemainx les corrections de travaux à faire, lendemains qui pourrait s'avérer fort prometteur.

Pour la prochaine saison, le tout débute, cette semaine, avec le Festival Quartier-Danse. Cette année, j'y ferai une plus grande place tout autant en plein air qu'en salle. Je vous met le lien ici, parce qu'il n'y a aucune raison de ne pas s'y déplacer. Pour ma part, parmi les oeuvres extérieures qui nous sont proposées, j'en retiens particulièrement deux. D'abord, "Déracinement" de Chloé Bourdages-Roy parce que d'elle, les gestes me plaisent beaucoup. Aussi, "Children of Chemistry" en version extérieure de Sébastien Provencher qui juste par le titre, attire mon attention de prof de chimie (évidemment !!!), mais aussi et surtout par le propos chorégraphique de ses oeuvres précédentes.

http://quartiersdanses.com/


J'irai en salle aussi, mais pour en savoir plus, faudra revenir sur mon blogue. Et aussi, je me ferai un devoir (plaisant) d'aller écouter une table ronde, "Tribune 840" à l'UQAM sur Cherrier (devinez l'adresse !). Le sujet "Quand l'art devient-il social ?" et pour moi qui pense que tout est dans tout, les réponses sauront m'intéresser. Intéressé(e) ?, c'est vendredi le 16 septembre à 12h30 et c'est Nayla Naoufal qui mène la discussion.

Je parle, je parle (oups, cela devrait être plutôt j'écris, j'écris) et la prochaine saison, je ne l'ai pas encore abordé. Je résume donc (oui,oui j'en suis capable !)

Quelques sorties chez Tangente, d'autres à l'Usine C/Agora de la danse, plusieurs au Théâtre La Chapelle, deux avec Danse-Cité, sans oublier celles à Danse-Danse et pour une première fois au MAI, parce que Claudia Chan Tak y présente, en décembre, "Moi, Petite Malgache-Chinoise". Je ne vous fournie pas les liens, tout bon fureteur, vous y mènera sans difficulté.

Je reviendrai sur le résultat de mes "quelques" pas, mais soyez avisé, faites en vous aussi, parce que de beaux mouvements, les scènes vous présenteront en abondance.









dimanche 21 février 2016

Sur mes pas en danse; totalement ébloui par "Cold blood"

De ma deuxième soirée au Festival Temps d'Images à l'Usine C, j'en reviens totalement ébloui. Je reviendrai peut-être sur ma première partie de soirée, "Intensional Particle" de Hiroaki Umeda, oeuvre intéressante mais avec laquelle je n'ai pas "connecté". Mais pas question de ne pas vous transmettre une parcelle du plaisir que j'ai eu à découvrir de ce que Michèle Anne de Mey, Jaco van Dormael et leur collectif Kiss and Cry m'ont fait vivre. Ce dernier verbe est d'autant ironique puisque c'est de la mort dont il est question durant une heure trente. Ayant raté la première présentation ainsi que la reprise de "Kiss and Cry", leur première oeuvre, je n'avais aucune idée de ce qui m'attendait avec ces doigts mis en avant plan dans les affiches qui annoncent de la nanodanse. Pour moi, des doigts, c'était utile dans des "Pages Jaunes" !

                                         Photo : Usine C

Si ma voisine était comme moi, ignorante de ce qui l'attendait, je soupçonne la majorité des spectateurs qui étaient présents étaient des "clients satisfaits" et attendaient le début de la représentation en trépignant.

Bon, nous attendons un peu et moi je grogne, je l'admets, parce que vingt minutes de retard, et bien, ça m'irrite. Devant moi, un écran prend place tout bas sur la scène et je suis heureux d'être tout proche en troisième rangée. Arrive enfin le moment où une voix nous informe des sorties d'urgence, que les lumières s'éteignent et que la magie commence. L'écran se lève, visible par toute la salle et dévoile l'envers du décor sans en briser la magie.

Aussi bien vous en avertir dès maintenant, ce que nous vivrons sur les différentes façons de mourrir sont tout aussi poétiques que spectaculaires. Si la majorité des oeuvres de danse auxquelles j'assiste déploient un minimum de moyens, "Cold Blood" impressionne par tout le côté technique qu'il nécessite. Il y a le résultat sur l'écran et le travail juste dessous. Une équipe de presque dix personnes, tableaux après tableaux, nous éblouissent, malgré l'envers du décor qu'ils nous présentent. Plusieurs moments forts, mais impossible de ne pas mentionner le moment durant lequel "Major Tom" de David Bowie est venu "illuminé" la salle, sans oublier la finale !!!!

Conseil d'ami, si un jour l'Usine C nous fait le privilège de représenter cette oeuvre, n'hésitez pas et faits comme moi, réservez vos billets vite. À voir et à revoir, sans hésitation.

lundi 15 février 2016

Sur mes pas en danse en "Temps d'Image": "Relative collider"

Si des travaux d'Einstein, nous reconnaissons actuellement ses contributions sur les ondes gravitationnelles, il serait approprié de se rappeler aussi de sa contribution fondamentale à la théorie de la relativité qu'elle soit restreinte ou générale. Ainsi donc, dans l'air du temps, "Relative Collider" de Liz Santoro et Pierre Godard se retrouve en symbiose avec l'actualité scientifique. Tout cela au moment  moi, je me rend à cette autre proposition de l'Usine C dans le cadre de son Festival Temps d'Images.

En entrée de jeu, dans cette grande salle, l'oeuvre fait effet. Pas de décor, sinon le grand mur de brique tout majestueux en arrière scène. Tout le reste est blanc, épuré, laissant place à l'oeuvre sans artifices, comme peut l'être une démonstration scientifique. Arrivent sur scène quatre personnes, trois danseront (Cynthia Koppe, Liz Santoro et Stephen Thompson) et l'autre, Pierre Goddard, s'installera derrière un clavier d'ordinateur.

Par la suite, nous aurons droit à ce que le lecteur du feuillet peut lire, soit "Une pièce subtilement dynamique, un crescendo infini mû par une logique aussi limpide qu'incaccessible." Sur le tempo d'un métronome qui ne dicte pas nécessairement le rythme avec en cours de représentation, la voie de l'homme au clavier, les interprètes captivent, autant par la simplicité que par la subtilité de leurs mouvements. Une oeuvre épurée, présentée dans un grand espace qui en rehausse l'effet, voilà une belle façon de percevoir notre présence dans l'univers. De ce moment passé, j'en suis sorti apaisé et totalement satisfait.

                                           Photo: Ian Douglas

samedi 13 février 2016

Sur mes pas de spectateur en danse: "Singeries"

Quiconque a suivi l'actualité ces derniers jour, a pris connaissance de la détection des ondes gravitationnelles. Véritable exploit technologique, leur détection est pourtant un simple son qui se répète pour le simple mortel. Ces ondes, donc, sont le résultat de la rencontre et de la fusion de deux corps noirs, il y a 1,3 millard d'années, aux confins de notre univers.

Imaginez maintenant, ce que la rencontre de deux corps vêtus tout en blanc peut produire, là maintenant, sans qu'un instrument ne soit l'intermédiaire de notre réception. C'est ce que nous avons pu découvrir avec "Singeries" de Priscilla Guy et Catherine Lavoie-Marcus, durant le Festival Temps d'Images à l'Usine C (co-présenté par Tangente). En direct juste devant nous, l'oeuvre s'avère au premier abord intrigant. Parce que voyez-vous, la scène qui s'offre à nous est remplie d'objets blancs (ou gris pâle) de toute sorte et les deux interprètes sont là, dans leur coin interagissant subtilement. La rencontre se prépare, c'est évident, avec des prises de contact visuel et des mouvements répétitifs qui nous permenttent d'anticiper. De notre côté, nos détecteurs visuels et auditifs sont en alerte maximum.

Comme tout phénoméne, le résultat de la rencontre de ces deux corps blancs s'est avérée complexe, parfois difficile à interpréter mais tout à fait fascinante. Difficile de trouver un fil conducteur à l'ensemble, mais les différents tableaux captivent, qu'ils soient en direct ou projetés sur écran ou même sur le corps d'une des deux interprètes. Tout phénomène pour exister nécessite une perception et les deux créatrices en ont exploité les différentes possibilités. Mon moment fort a été le tableau dans lequel, elles se trouvent au sol en fusion avec les projections sur le plancher et l'écran, déformant ma perception de l'espace et qui a saturé mes capteurs visuels et mon plaisir.

De ces moments, durant lesquels interagissent ces deux artistes, appuyées entre autres, par Michel F. Côté à la création sonore, Antoine Quirion Couture aux effets vidéo, il en reste des traces difficiles à décrire, mais tout à fait imprégnées sur mes rétines et dans ma mémoire. Parce que le blanc, riche de toutes les couleurs qui le composent, peut faire forte impression, pour peu que les artisans qui le manipulent sachent y faire. Pour cela, mission accomplie, mesdames.

                                         Photo : Catherine Lavoie-Markus