dimanche 28 octobre 2018

Sur mes pas en danse: "Ground" riche de ses dualités, "up and down" !

De Caroline Laurin-Beaucage, "Ground" n'était pas ma première rencontre artistique. Difficile sinon impossible pour moi d'oublier deux de mes rencontres avec elle et son "cube" avec "Habiter sa mémoire" (titre prémonitoire dans mon cas !, parce que dans ma mémoire, elle y est restée). Elle qui des heures durant, partout sur notre globe, danse et patiemment emmagasine les gestes dans des lieux publics avec des gens, autour d'elle, plus ou moins attentifs. De ma rencontre sur la Place des Festivals, j'avais écrit, "Impossible de ne pas être touché par cette artiste du mouvement qui nous montre comment il est possible de si bien habiter sa mémoire et de nous en laisser des traces dans la nôtre." J'en avais vu un condensé de ses pérégrinations à l'Arsenal, gracieuseté de Danse-Danse et j'avais assez apprécié pour espérer une suite sur une scène "près de chez nous" !

Mais en cette soirée automnale, c'est pour découvrir sa plus récente création "Ground" que mes pas m'ont amené jusqu'au Wilder. À mon arrivée, la foule est déjà fort nombreuse et c'est devant une salle comble et moi du siège de "ma" première rangée que je ferai la rencontre avec cette oeuvre. Et cette rencontre sera pleine de rebondissements ! Parce que voyez-vous, les cinq interprètes (Rachel Harris, Kimberley De Jong, Brianna Lombardo, Louis-Elyan Martin et David Rancourt) performeront, tout en saut, devant nous presque toujours sur une trampoline.

                               Photo: Sevtla Anatasova tirée du site de l'Agora de la Danse

Voilà une oeuvre qui pour moi, est un exemple de perceptions multiples. À l'intention de la chorégraphe "Aux interprètes alignés sur des trampolines, suivant une cadence qu'ils ne contrôlent pas, à laquelle ils doivent répondre, semblant condamnés au mouvement, à l'effort, à se tenir ensemble, invoquant nos cycles circadiens" (extrait tiré du feuillet de la soirée), certains apprécieront surtout la forme. À titre d'exemple, il faut lire la critique de Mélanie Carpentier dans Le Devoir (https://www.ledevoir.com/culture/danse/539826/recast-melanier-laurin-beaucage ).

Pour ma part, c'est surtout la symbolique qui m'a frappé. Celle du quotidien, "terre à terre", celle qui fait qu'on se lève le matin aux chants des oiseaux et que l'on doive "vivre" au rythme effréné de la société jusqu'au retour à la maison, sans réelle pause pour le sprint final, souper-dodo. Un rythme de vie ne permettant qu'un léger déphasage entre nous, vite corrigé (celui du passage de l'autobus, du métro et du trafic sur le pont). Des moments frénétiques qui me rappellent ceux que j'avais vu en 2005 sur grand écran avec "La Marche de l'empereur" de Luc Jacquet.

Une oeuvre aussi qui me frappe par la dualité des sens qui en émerge, celle de l'onde radio (FM) et de ses déclinaisons individuelles de 88,5 à 107,3. Celle aussi de l'individualité dans la collectivité. Celle de la nature double du photon, particulaire et ondulatoire. À ma réaction initiale, "je persiste et je signe", voilà une oeuvre que seule une femme aurait pu créer. Parce que voyez-vous, cette sensibilité au cycle et à l'urgence de s'y conformer, je ne suis pas certain qu'un chorégraphe-homme aurait pu nous la présenter de cette façon.

Une oeuvre riche, à mes yeux, de ses symboles, qui en permet ma lecture et mes interprétations. Une toute petite heure de spectateur, mais qui se prolonge bien après comme les ondes dans la marre, une fois la pierre lancée, avec aussi, le "REBO(U)ND extérieur, projeté sur le mur extérieur de l'immeuble. Projection que j'ai appréciée presque seul en cette soirée assez froide d'octobre.

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