vendredi 29 novembre 2019

Sur mes pas en danse: Rêver par procuration grâce à "Bygones" !!!

Pendant que les différents artisans de la scène chorégraphique québécoise présentent leurs créations aux diffuseurs (à Parcours Danse) pour, je l'espère, être vus et appréciés par le plus grand nombre, l'Agora de la Danse nous proposait une fort belle proposition. "Bygones" de la Out Innerspace Dance Theatre (Tiffany Tregarthen et David Raymond). De cette compagnie, je me souviens encore de "Major Motion Picture", aussi présentée par l'Agora de la Danse, il y a deux ans et dont j'avais écrit sur ce site, "Mais aussi et surtout, l'impression de voir des choses inédites. Des façons de présenter, jamais vues pour moi jusqu'à maintenant."

                                De David Raymond

Il semble que je devrai me répéter pour cette proposition. Comme l'annonce le feuillet de la soirée, "Architecture spectrale, marionnettes et théâtre d'illusions créent un monde de pseudo-choses et de sois surnaturels existant dans les marges de la forme et de l'informe.", j'ai été, encore une fois, dans des territoires nouveaux. Cette fois, plutôt que de s'appuyer sur le cinéma, c'est sur le théâtre que les créateurs semblent avoir construit leur proposition. 

C'est donc en navigant dans le réel, dans le surréel et aussi dans le surnaturel que j'ai observé les différents personnages, magnifiquement interprétés par Elya Grant, David Harvey, Renée Sigouin, Tiffany Tregarthen et David Raymond) et les objets aussi. Ces derniers semblant eux aussi dotés de vie autonome. Le tout débute avec ces êtres qui survolent la scène tout au fond et de cette femme qui s'éveille dans une autre dimension ou peut-être de l'autre côté du présent, soit dans le passé, imaginé ou imaginaire. Les différents tableaux nous en présentent différents moments qui tiennent du magique et du fantastique.

Si le tout fonctionne si bien, cela est dû, de ma perspective de spectateur, à la qualité et à la précision d'exécution des interprètes qui œuvrent dans les éclairages fort impressionnants (de James Proudfoot), du jamais vu pour moi ! Je suis impressionné par ces personnages qui se déplacent, par exemple, du côté sombre au côté éclairé de ces murs créés par les projecteurs, en apparence fort réels. Je suis mystifié par ces éclairages, tel des trous noirs, qui engloutissent en leur milieu les personnages. Il y a aussi ces couloirs lumineux qui se déplacent sur scène et que ces personnages suivent sans pouvoir en voir la fin.

D'autre part, je retiens aussi les différents tableaux avec ce parapluie qui entre les mains d'un homme, prend vie et s'ouvre et se ferme et qui "pulse" au rythme qu'il induit à notre cœur. 

Le tout est fort bien appuyé par l'environnement sonore et musical qui rehausse le côté fantastique des tableaux. Et lorsque le côté magique s'estompe, il laisse place aux corps qui nous ramène fort habilement au moment présent et sa réalité. Au final, une très belle soirée qui nous amène à espérer que nous ne sommes qu'à une fine ligne entre le réel et l'imaginaire.

dimanche 24 novembre 2019

Sur mes pas en danse: "Plongée" dans des univers féminins

Décidément, ces derniers temps, la plupart de mes différentes sorties culturelles m'amènent vers des univers féminins et à chaque fois, j'en reviens troublé, de ce trouble qui permet de requestionner certaines de mes perspectives masculines. Fort satisfait aussi, parce que, comme l'écrit Hugo Latulippe dans son essai "Pour nous libérer les rivières", l'art nous permet de nous "Libérer de nous" et de nos ornières, je serais tenté d'ajouter.  Que je le veuille ou pas, je suis le produit de mes origines différemment déclinées. De ces formatages familiaux, culturels et scolaires qui orientent mon parcours.

Voilà pourquoi, au final, le programme double de Tangente m'a intéressé, d'autant plus que moi le peu athlétique jeune homme, j'étais admiratif de ceux et celles, talentueuses, qui pouvaient utiliser leurs habiletés pour "performer". Moi, sur la touche, je ne pouvais être qu' envieux!

                                          Photo de Tess Martens par Scott Lee

                                         Crédit de Caroline St-Laurent et Taos Daphné Houasnia

Mais il peut y avoir un côté sombre, sinon ombragé, à ce que les projecteurs nous montrent et c'est en ses eaux troubles que "Slow Change" de et avec Tess Martens et "Nadia, est-ce que ça va ?" de Liliane Moussa et Caroline St-Laurent avec Marilyn Daoust, Anne-Flore de Rochambeau, Marine Rixhon et Liane Thériault, nous plongent.

Une soirée qui débute avec une entrée en salle avec une invitation à prendre place sur un des coussins près cette petite scène surélevée sur laquelle se retrouve debout l'interprète de "Slow Change". Plusieurs, dont moi, accepteront cette invitation, tandis que d'autres iront prendre place dans un siège dans les estrades de l'Espace Orange. Sur cette scène, se retrouve deux sacs et une radio avec pas trop loin, cinq maillots accrochés. Un peu avant le début de sa prestation, Tess Martens, tout en interpellant avec son regard, nous invite à nous rapprocher. Et puis débute cette rencontre "performative" qui débute par son dépouillement vestimentaire pour endosser ses habits de nageuse synchronisée. Difficile de rester impassible, sinon même mal à l'aise, devant et si proche sur mon coussin, de sa métamorphose de femme toute ordinaire en "nageuse", vêtue de son maillot jaune. Elle "plonge" parmi nous (audacieux spectateurs sur les coussins) dans une série de mouvements répétés à la cadence de "one to eight". Rien ne semble agréable dans ses mouvements, peut-être une détermination à aller au bout jusqu'à ce qu'on lui demande. Une fois la première "routine" complétée, elle revient, se "drappe" en bleu pour replonger dans son rôle et parmi nous, tels des molécules d'eau (H2O). De mon point de vue, cette femme se décompose. Sa nature se désagrège devant moi et je ne peux rester indifférent. Je ressens fortement le traumatisme passé. Et puis arrive le moment où elle quitte sans regarder derrière et ni non plus accueillir nos applaudissements.

Il me faudra un certain temps pour émerger de cette prestation et suivre les indications à quitter la salle.

À mon retour, bien installé sur un siège en première rangée, j'attends le début de "Nadia, est-ce que ça va ?", question que j'aurais volontiers posé à Tessa Martens, suite à la première partie de cette soirée.

Nadia (Comaneci) qui a révolutionné l'univers de la gymnastique (aux Jeux Olympiques de Montréal) avec ses "10", était-elle le produit d'un "formatage" idéologique qui a encore aujourd'hui ses entrées dans les lieux performatifs des "Filles en série" ( comme je l'ai lu dans l'essai de Martine Delvaux) ? Ce formatage "dépersonnalisant" et opprimant semble encore exister et c'est ce que je découvre devant moi. Le principal intérêt de ce qui suivra est la décision des créatrices de nous le présenter à rebours pour nous amener à l'origine du besoin de s'exprimer. D'abord, dans des costumes fort fragiles, fait de papiers d'emballage, ces quatre femmes nous proposent des mouvements synchronisés qui au gré des mouvements, montrent des fractures vestimentaires comme chorégraphiques. Comme le maquillage, est-ce dans les fractures que la nature se révèle ?

Il s'en suit, un tableau fort riche durant lequel en duo, elles établissent un langage corporel. Exercices fort beaux, mais interrompus par un signal de plus en plus incommodant. Leurs regards le démontrent de façon fort éloquente. Je l'ai perçu comme la première étape de ce "domptage" des corps et des esprits. Et puis arrive en fin de présentation, les moments de liberté, durant lesquels, ces femmes peuvent s'exprimer en toute liberté. Ces moments qui révèlent les motivations premières et sans contrainte de s'exprimer !

Si, pendant la présentation de l'oeuvre, le sens inversé ne m'était pas apparu, ma réflexion au retour à la maison me l'a fait réaliser, suivi du constat du prix à payer pour être sous les projecteurs.

S'il m'arrive que de rester satisfait au retour d'une oeuvre, cette fois, la réflexion qui en suivait m'a interpellé sur ma propre posture professionnelle et m'a fait poser "la" question, comme citoyen, "Robert, est-ce que ça va ?"

Merci mesdames, rien ne sert de se mettre à l'abri, ce costume que nous endossons peut s'avérer fragile et chaque rappel mérite que l'on s'y attarde.

samedi 16 novembre 2019

Sur mes pas vers des "courts": riches des "Voix de femmes autochtones"

Tout au long du mois de novembre, quatre Maisons de la Culture de la ville de Montréal s'unissent pour nous présenter différentes propositions artistiques, en danse, en musique, en théâtre, en chanson et en cinéma. "Une invitation à l'échange et à la découverte" comme l'indique le feuillet que j'ai reçu avant la découverte des courts métrages "tout horizon"  de l'ONF, à la Maison de la Culture de Rosemont-La Petite-Patrie. Point de laisser-passer nécessaire pour y assister et nous serons assez nombreux à prendre place devant l'écran.



Une fois les mots d'une responsable de la Maison de la Culture et de celle de l'ONF, Sonia Bonspille Boileau, réalisatrice (dont j'avais bien apprécié sur long métrage "Le DEP" en 2015) nous présente le menu des moments à venir qu'elle nous a sélectionné et qui nous sera présenté en quatre blocs.

Par la suite, nous découvrirons dix courts métrages de réalisatrices autochtones. Des courts métrages de différents styles, de l'animation pur à du style plus documentaire. Avant chaque bloc, elle nous les présente comme le ferait une maître d'hôtel devant un menu fort bien appétissant.

De ces dix courts métrages, je n'en retiens pas tous les titres, mais les histoires et les propos, oui !

Nous sommes amenés dans différents lieux du grand nord, très froid jusqu'à Montréal et sa banlieue. Celui dans "Délia de 9 à 5" qui nous présente le quotidien de cette femme qui doit sortir de chez elle pour trouver de l'eau potable, donner le bain à ses jeunes enfants et préparer le bois de chauffage (tout en étant enceinte, comme quelques personnes présentes dans la salle l'ont remarqué "tout haut" pendant le visionnement ! Cette longue marche de ces jeunes innus dans un objectif d'affirmation et de rencontre. Ce court métrage d'animation qui nous présente les premières expériences homosexuelles de jeunes filles. Nous serons entraînés dans une descente de rivière dans le grand nord jusqu'au quai d'attente dans le métro de Montréal. Il y a aussi cette pêche sur la glace fort surprenante pour nous les "blancs" !

Dans le quatrième bloc, deux courts sur la crise d'Oka dont le dernier fort interpellant "Je m'appelle Kahentiiosta" d'Alanis Obomsawin, Une perspective frappante et troublante portée par cette femme qui ne veut pas plier le dos. Pour les intéressé.es, voici le lien sur le site de l'ONF pour le visionner ( https://www.onf.ca/film/je_mappelle_kahentiiosta/).

Une douzaine d’œuvres fort riches en diversité qui ont été suivies par une séance de questions réponses qui l'a été tout autant. Nous avons appris, entre autre, qu'un grand nombre de courts pouvait être visionnés en ligne sur le site de l'ONF, soyez en informés !

Un après-midi fort bien utilisé pour découvrir encore un peu plus ces peuples fort riches de leur diversité.

vendredi 15 novembre 2019

Sur mes pas en danse: Un voyage tout en symbole, présenté à "L'encre noire" de La Tresse

C'était, il y a plus de deux ans, je découvrais au CCOV, trois filles ( Geneviève Boulet, Laura Toma et Erin O'Loughlin) du Collectif LaTresse qui avaient du cran, comme je le rapportais dans un de mes textes et je me promettais de suivre les prochains pas. Depuis, rien sur mon radar de spectateur jusqu'à récemment. Elles nous proposent leur première pièce intégrale et moi, je me suis vite procuré mon billet. Et je n'étais pas le seul, à preuve les salles combles et la supplémentaire.

                                          Tirée du site de l'Agora de la danse

C'est devant la porte de l'Espace Bleu que nous attendons pour prendre place. Une fois rendu dans la salle, la scène est maintenue dans une certaine noirceur, nous permettant, néanmoins de voir sur le plancher de la scène une toile foncée avec des aspérités. Le temps passe, la salle se fait comble et puis arrive le moment que les lumières se font discrètes. Aux aguets, j'observe la scène et découvre des mouvements sous la toile.

Peu à peu, dans ce premier tableau fort et fort bien réussi, apparaissent peu à peu des jambes de femmes. S'en suit tout en ondulations, leurs corps nous apparaissent. Ces femmes "viennent au monde" et nous entraîneront dans un voyage initiatique riche en symboles. Utilisant fort bien, tel qu'annoncé, le folklore, la fantaisie et le sacré, les différents tableaux s'enchaînent de façon fort habile. Je me sens amener dans une expédition dans différents univers riches de leurs symboles.
Ces trois femmes sont investies, cela se ressent, tout au long de la naissance de leurs personnages jusqu'à leur libération. Durant ce périple, il y a ce moment, par un éclairage fort habile (bravo Hugo Dalphond !) durant lequel la scène devient un espace "immense" et "dans ma tête" riche d'un bel avenir ! Le tout est porté par une trame sonore de Marc Bartissol et Antoine Berthiaume qui enrobe fort efficacement, et que j'ai bien aimé, le propos chorégraphique.

Il faut voir cette oeuvre comme une expédition fort belle dans un univers féminin sacré appuyée par les déclinaisons culturelles des trois membres (irlandaises, roumaines et québécoises) de ce collectif.

La discussion d'après représentation a été pour moi fort intéressante, mais pas seulement pour les questions et les réponses, mais aussi par les sourires des trois interprètes, satisfaites, comme moi, de ce parcours initiatique et de ses symboles.

dimanche 10 novembre 2019

Sur mes pas en danse: Une Passerelle (collectif 842) fort intéressante !

Les jours raccourcissent et la première vraie bordée de neige est sur le pas de nos portes. Il fait sombre vite, voilà donc pourquoi, le besoin d'aller à la découverte de jeunes artistes au printemps de leur carrière s'est avéré pour moi, une médecine fort appropriée pour mon blues automnal.

Au programme, trois oeuvres, d'abord "Théorie popcorn" de et avec Paméla Aubé et Châtelaine Côté-Rioux, suivie par "Le haïm (à la vie)" de et avec Anna Erbibou et pour finir "Scène de bain" de Lila Geneix avec Alice Marroquin Ethier et Alexis Tremblay (aux "mouvements") et Victor Tremblay Baillargeon (à la guitare).



En ce dimanche après-midi, la foule est nombreuse dans le hall et la salle sera bien pleine.

À notre arrivée dans la salle, les deux interprètes de "Théorie popcorn" sont déjà là, immobiles. Elles sont là de part et d'autre de la pièce qui a tout les allures d'un salon. En début de présentation (dans le feuillet , elle annonce leurs couleurs, "Dans un nuage d'ondes se trouve un infini de solitudes." La suite sera une démonstration de ces ondes dans le temps (et des mouvements qui l'accompagnent) qui se déploie en ondes sonores provenant de tout le spectre. En entrée de jeu, difficile de ne pas remarquer cet appareil qui date d'une époque ancienne (téléphone à roulette fort présent dans ma jeunesse !) à la main d'une deux femmes qui finalement le laissera en suspend dans les airs. La suite, composée des déplacements des deux femmes, sera donc modulée de grande variation, bien "en phase" avec la musique de différentes pulsions. Cette "Théorie Popcorn" a tout d'une version humaine de la théorie du bing-bang, avec ses chocs et ses déplacements qui laisse des traces en nous. Une quinzaine de minutes fort bien surprenantes avec "pour les gourmands des yeux" une immense boule suspendue de maïs soufflé fort intrigante.

Le temps de "faire le ménage", nous avons droit à la présentation de la prochaine oeuvre, "Le haïm (à la vie) qui d'abord nous plonge dans le noir le plus total. Et puis nous apparaît accroupie ( ou assise ?) de dos, cette femme dans un carreau de lumière. Portée par la musique de Armand Amar, tirée du si beau et touchant film "Va, vis, deviens" (de Radu Mihaileanu), nous la verrons à différentes étapes sur la ligne (diagonale) de son destin. Il y a de réelles émotions que se dégagent en observant les mouvements de son dos enrichis par un éclairage discret, mais fort efficace (bravo Mateo Barrera !). Une oeuvre forte de son intériorité et qui réussi avec sobriété à nous toucher. Je dis nous, parce que je suis convaincu que mes sentiments étaient partagés.

Courte pause pour revenir à un état neutre pour repartir ailleurs avec "Scène de bain" de Lila Geneix qui "soyez avertis", nous amènera vraiment ailleurs. Devant nous, quatre carrés de gazon, trois miroirs sont installés. Viendra s'y ajouter le bain, pièce centrale de l'oeuvre. Un musicien prend place aussi sur le côté. Le tout débute de façon surprenante et originale (pas question de gâcher la surprise !) et se poursuit dans une suite de tableaux fantaisistes de cette version du "Portrait présumé de Gabrielle d'Estrées" que tous ont sûrement déjà vu. Que pouvait-il se passer derrière les portes closes au moment du bain ? Cette perspective fantaisiste garde notre attention, nous amuse. Cette femme accompagnée sur la toile par sa sœur, est cette fois, accompagnée par un homme, son amant (Henry IV) (?) qui fait une entrée fort remarquée. 

De leurs jeux à deux, nous serons témoins d'une habile utilisation des accessoires, dont et surtout du bain, cristallite de l'oeuvre, lieu de découverte et de transformation et point final aussi ! L'accompagnement d'une guitare électrique créée une dichotomie fort surprenante qui amplifie les gestes.

Au final, trois œuvres toutes différentes qui pourraient facilement être allongées, qui le devraient aussi, et qui nous permettent d'entrevoir des beaux jours. Et je ne parle pas de la météo. 

vendredi 1 novembre 2019

Sur mes pas vers une belle rencontre: "Le temps d'être" de Claudia Bernal !

Cette rencontre "improbable" est le résultat d'un alignement des astres, mais surtout, grâce aux bonnes actions des algorithmes. Pour faire court, sur mon fil FB apparaît une proposition artistique, intéressant des amis, une installation performance de Claudia Bernal, librement inspirée du roman "Mr Gwyn" d'Alessandro Baricco. Cette artiste, je ne la connaissais pas, mais, l'auteur du roman, l'inspiration de sa création, lui, comme lecteur, il m'allume. Par exemple, "Novecento", je l'ai lu et relu et son incarnation sur la scène toute sombre de l'Usine C par Pierre Lebeau reste pour moi, des moments fort marquants ! "Soie" et son adaptation cinématographique l'a été tout autant. Alessandro Baricco est écrivain, mais aussi homme de théâtre, ce qui explique bien, selon moi, comment ses livres se prêtent bien au passage devant public. 

Pour cette fois, le roman "Mr Gwyn", je ne l'avais pas lu. Question de combler mon retard et de préparer ma rencontre, je me suis mis à la lecture du roman et très rapidement, j'ai été happé par l'histoire. Happé et pressé aussi d'en terminer la lecture avant ma rencontre avec "Le temps d'être" ! Et ce fut mission accomplie, c'est avec l'histoire fraîchement en moi que mes pas m'ont amené jusqu'à la porte, toute sombre, mais ouverte de l'Agora Hydro-Québec de l'UQAM. En dedans, c'est sombre et propice à une rencontre toute intime et, soyez déjà informé, elle le fût, mais allons y doucement et dans l'ordre.

                                          Photo: Adriana Garcia-Cruz

Une fois mon droit d'entrée acquitté, je suis invité à laisser sur un cintre mon attirail de déplacement automnal. Je suis aussi invité à découvrir le lieu avant le début de prestation. Spectateur prudent, je trouve mon siège, d'abord, parmi les différents choix encore libres sur un des trois côtés du lieu de prestation. Il y a bien des fauteuils rouges plus confortables, mais les projecteurs qui les illuminent semblent m'indiquer qu'ils ne sont pas destinés aux spectateurs. Impression qui me sera confirmée par la suite ! Une fois assis, comme d'autres, j'irai par petites touches examiner les quatre piles de livres avec tout en bas des B.D. de Tintin et d'Astérix. Il y a aussi au milieu un lit, avec devant et derrière un drap avec des citations du romans et aussi une cage avec deux oiseaux fort discrets avec en dessous des bouts de papier avec encore, des mots de l'oeuvre. Sans oublier les deux draps ou toiles qui serviront à montrer les projections ou à protéger face aux confessions Le temps que la représentation débute, tous les sièges ont trouvé preneuse ou preneur et même un peu plus. 

Le lieu est calme et rappelle le local que M. Gwyn a choisi et aménagé avec soin pour faire ses portraits écrits. Et moi, dans ce lieu, je m'y trouve bien ! Le moment venu, nous arrive cette femme qui découvre le lieu et qui comme dans le roman se laisse au regard de l'autre. Tout au long des trois tableaux, elle se dévoilera à nous, au propre comme au figuré. Elle le fera dans l'atmosphère sonore, en boucles, qui m'a fait penser à celle que j'ai imaginé en lisant le livre. Et ce n'est pas le seul élément de la présentation qui m'a fait sentir comme dans le livre. Je n'étais pas et je n'ai pas été Mr Gwyn (ce qui a été le privilège d'un des spectateurs !), mais cette intimité, je l'ai ressenti fortement. 

Le temps a passé sans que je n'en sente son cours et une fois les ampoules toutes éteintes (comme dans le roman), la rencontre sans artifices et en douceur s'est terminée. 

Merci Claudia Bernal, Thierry Gauthier (composition électro-acoustique et spatialisation sonore) et Cédric Delorme-Bouchard (éclairages) pour cette belle rencontre. Vous avez su me présenter l'essence de l'oeuvre de cet écrivain et me faire passer de beaux moments ! Et aussi me le faire encore plus apprécier !