Ma saison culturelle en salle est bien entamée et très active, comme me le rappelait récemment mon passeport vaccinal ! Et les gens de Danse Danse y ont contribué pour mon plus grand plaisir avec trois propositions. Il y a eu, d'abord, "La Probabilité du Néant" d'Alexandra 'Spicey' Landé (et sa compagnie Ebnflōh). Ensuite, "Cão Sem Plumas" (« chien sans plumes ») de Deborah Colker en webdiffusion et enfin, plus récemment, "L'effritement des parades" d'Alan Lake (Alan Lake factori(e)).
Donc pour ma première sortie à la Place des Arts, je suis invité à prendre un chemin différent pour me rendre dans la Salle Maisonneuve. Chemin qui m'amène sur la scène de cette salle et prendre place dans les estrades, installées pour cette occasion. Arrivé un peu juste et comme c'était admission générale, c'est loin de "ma" première rangée au milieu des estrades fort bien garnies que je prend place. Mais comme personne ne s'assoit devant moi, ma vue sera imprenable pour ce qui suivra. Déjà sur scène les huit interprètes (Nindy Banks, Ja James ‘Jigsaw’ Britton Johnson, Jaleesa ‘Tealeaf’ Coligny, Kosisochukwu ‘Kosi’ Eze, James-Lee ‘Kiddy’ Joseph, Christina ‘Hurricane Tina’ Paquette, Alexandre ‘Bibiman’ Philippe-Beaudoin. Elie-Anne ‘Rawss’ Ross). Je ressens dans leurs comportements face à une certaine fatalité !
Tirée du site de Danse DansePause
Ce moment résonne en moi puisqu'il y a un an et demi, l'oeuvre précédente de cette chorégraphe, "In-Ward" était la dernière que j'avais vu en salle avant la fermeture des salles à cause de la pandémie.
Fin de la pause
Leurs déplacements sont intrigants et les mots, projetés en gros en arrière scène, interpellent "An eye on you", en lien avec une phrase de présentation, l'oeuvre "pose un regard lucide sur notre perception, notre jugement et les conséquences de nos choix." La suite arrive avec les lumières éclairant les spectateurs qui se font de plus en plus discrète. La suite est constituée de tableaux de danse urbaine, style que j'apprécie de plus en plus et cette chorégraphe en est grandement responsable. C'est le microcosme d'une société avec sa diversité, ses interrelations que je vois évoluer devant moi. La scène, libre de tout artifice, me laisse tout libre de découvrir le repli de l'un.e, l'affirmation de l'autre et le rassemblement de tous. Une soirée qui m'a permis de découvrir les pas sur scène de plus en plus affirmés de cette chorégraphe.
Avant le prochain rendez-vous, une proposition en webdiffusion que j'aurais tellement aimé voir en vrai. Il en reste que la présentation du documentaire, "Où commence la rivière" de Filigrane Archives qui présente une entrevue avec la chorégraphe et le processus de création, je l'apprécie vraiment. Voilà un enrichissement à l'oeuvre à venir que j'ai appris à apprécier pleinement.
La captation me permet de découvrir une proposition internationale qui me plonge dans un univers où sont floues les frontières entre la rivière et la terre. Frontières mobiles et furtives sur lesquelles 14 interprètes sur scène évoluent avec en arrière scène des projections tout en osmose avec les mouvements. Un heureux mariage des arts visuels et de la danse qui je suis convaincu, produit grand effet lorsqu'on est en salle. En ces temps où la frontière est fermée aux artistes d'ailleurs, cette webdiffusion est fort bienvenue !
Et enfin, pour ma deuxième sortie en vrai à Danse Danse, c'est dans la Cinquième Salle de la Place des Arts que mes pas m'amènent pour découvrir "L'effritement des parades" d'Alan Lake. Je ne serai pas encore en première rangée et en plus tous les sièges peuvent être occupés, dont ceux juste à ma droite et à ma gauche. C'est pour moi une première, mais de cette proximité nouvelle, je m'y accommode bien !
Une fois, les directives d'usage énoncées, et le tout débute devant moi avec l'apparition de cette femme (Esther Rousseau-Morin), majestueuse, toute dorée et le corps gorgé de vie (lire ici enceinte de plusieurs mois). Tout lentement et avec assurance, elle prend possession des lieux et de sa présence sur cette terre, la vie apparait. Une vie composée d'épisodes comme le chorégraphe nous y a habitué. Une scène riche en accessoires fort en symboles, tels que ces gerbes de blé. L'histoire de Perséphone, déesse grecque, qui nous est présenté prendra le sens que l'on y voudra.
Tirée du site de Danse DanseAutre pause
Sur ce point, l'article de Guylaine Massoutre sur le site de la revue Jeu, est vraiment intéressant !
Fin de l'autre pause
Pour ma part, je voudrais surtout revenir sur deux aspects de ce que j'y ai vu et qui m'ont impressionné. D'abord, l'exigence pour les interprètes, tout au long de l'oeuvre, d'avoir à manipuler tous les objets scéniques tout au long de la présentation. Bravo à vous Esther Rousseau-Morin, Odile Amélie Peters, Fabien Piché et David Rancourt. Lors du tableau final, lorsque ce dernier doit se mettre en équilibre sur un coussin, je suis fasciné de le voir y arriver. Ensuite, l'utilisation de la matière, signature du chorégraphe, pour obtenir des tableaux scéniques fort riches en symboles et aussi très beau. Il est intéressant de voir évoluer les interprètes pour créer devant nous une pause esthétique fort belle et riche.
Voilà une oeuvre qui mérite qu'on la voit et la revoit pour pouvoir mieux apprécier les détails fort nombreux et pour pouvoir aussi se faire raconter une autre fois cette histoire.