La proposition était fort tentante, mais aussi intrigante ! Pour ouvrir sa saison, Tangente nous proposait des moments qui avait pour moi, une perspective tout à fait nouvelle, soit d'installer dans le même espace trois performances en évolution simultanément. Ainsi donc, j'irai à la découverte de "The Choregraphic Garden" de Hanna Sybille Müller et toute son équipe, dont Nate Yaffe et Maria Kefirova aux mouvements, "Espaces construits, corps mobiles" du Collectif FRAM, incarné par Frédérique Rodier aux mouvements et aux déplacements ainsi que "S'imbriquer" de Philippe Dépelteau, mis en mouvements par Luce Lainé et Camil Bellefleur. Pour cette proposition, j'en étais à une deuxième rencontre, la précédente avait eu lieu lors de la présentation des "Bancs d'essai" par Circuit-Est en avril dernier ! Pour les intéressé.es voici le lien de mon retour: https://surlespasduspectateur.blogspot.com/2023/04/sur-mes-pas-vers-circuit-est-centre.html
Tout au long que mes pas m'amènent jusqu'à l'Espace Orange du Wilder, je suis intrigué de la façon dont sera partagé le territoire, d'autant plus que moi, je veux "tout" voir ! Le feuillet qui nous est donné à l'entrée de la salle, en plus des crédits, nous y trouvions une question fort pertinente et universelle, utile pour la suite, soit "Comment coexister dans un espace en transformation ?" En plus, il nous était annoncé que la visite en ces lieux serait inhabituelle !
Une fois les portes ouvertes, je me dirige dans le lieu dans lequel se trouvent déjà les "gangs" de "The Choregraphic Garden" et "S'imbriquer". Une fois mon évaluation des lieux faite, je prend place sur un "coussin" qui devrait me permettre de ne "rien rater" ! Et lorsque le tout se met en marche, je peine à suivre ce qui se passe en mouvements dans des lieux opposés de l'endroit. Pour ces premiers moments, soit les vingt premières minutes des deux cent quarante de la soirée, mon constat est cruel, je suis dépassé ! Pour moi, trop de choses à suivre simultanément, lire ici deux, et je dois faire des choix, dans le sens, regarder à droite ou à gauche. C'est là que je prends la meilleure décision de cette soirée, soit, prendre du recul et exprimer mon "inconfort" à qui de droit qui de façon fort avisée me rassure et me donne aussi une réponse rassurante. Donc, à mon retour en salle, effectivement le cours des choses, pour moi, se placent et je pourrai découvrir avec une alternance plus confortable pour moi, ce que les trois performances ont à m'offrir.
Au final dans les deux cycles de deux heures, je me mets en position d'écoute pour découvrir ce qui m'est proposé. Pour les fins de ce texte, je reviendrai sur chacune d'elles, sans tenir compte de la chronologie de ce que je découvre. Dans l'espace à droite, "The Choregraphic Garden" de Hanna Sybille Müller se présente avec des bâches sous forme de poches. Dans cet espace animé sonorement par Damaris Baker, les deux interprètes dont les mouvements ont tout du duo athlétique "percutant". J'y vois une illustration de la thématique de la résistance des choses, comme dans nos perceptions des autres ou de nos habitudes. Une fois leurs "propos" exprimés, le groupe se rencontre pour débuter un "long" conciliabule qui semble indiquer la fin de la première partie. Et dans la deuxième partie, le propos oral se joindra à celui chorégraphique, avec les deux interprètes qui arpentent les lieux tout en énonçant des phrases dont celle-ci, "How far you can go to be free ? Je retiens aussi une expression, "concept of dirt" tout en découvrant qu'une des bâches de la première partie est maintenant remplie de terre et laissera des traces de ses déplacements dans le lieu. Traces qui seront balayées par la suite ! Voilà une proposition qui amalgame propos et mouvements pour nous amener dans une réflexion philosophique. Je me souhaite de la revoir seule et achevée pour approfondir la réflexion débutée !
Crédit »Mariana Frandsen fournie par TangenteDu côté gauche, dans l'espace se retrouvent une grande quantité de briques pour la présentation de "S'imbriquer". De mes premiers moments d'observation jusqu'à la toute fin de la présentation, cette proposition clôturant la soirée, j'y découvre le travail inlassable de ces deux êtres humains qui organisent et réorganisent ce territoire comme pour nos idées et nos préjugés. Toutes ces briques assemblées pour devenir des discours ou des idéologies, sur lesquels ont s'appuie et qui pourront devenir des monuments temporels ou des assemblages éphémères. Le moment fort, pour moi, arrive dans la deuxième partie durant laquelle, elles quittent ce territoire pour aller plus loin. Comme si nous devions faire le deuil d'un certain confort pour oser aller dans l'inconnu. Et de ce départ de ce monde que l'on tente de réorganiser, il semble que pour le créateur, ce sont les corps qui doivent s'imbriquer, sans trop tenir compte de ses contraintes matérielles qui les entourent. Il en reste que c'est déchirant pour moi, plus âgé, de découvrir que le salut dans "nos terres" semblent impossible pour ces jeunes qui partent "brique à la main" !
Crédit Vanessa Fortin fournie par TangenteTout au long de la présentation, nous apparaîtra Frédérique Rodier dans "Espaces construits, corps mobiles". Voilà, pour moi, une proposition qui m'a particulièrement interpellé, par sa forme et le plus captivé par les mouvements de cette femme.
Pause
Je n'ai pas eu souvent la chance de la voir sur scène, une fois en fait, mais par les réseaux sociaux, beaucoup plus souvent, mais pour moi, sa gestuelle est unique et captivante. En tout ca, elle me plait beaucoup !
Fin de la pause
Crédit »Mariana Frandsen fournie par TangenteTout au long de ses apparitions, elle investie le lieu par ses déplacements, nous entraînant hors de la salle pour y revenir. Tout au long, elle illustre bien le titre de sa proposition. Elle ira à la rencontre de ses espaces construits en s'y appuyant de façon fort "éloquente" avec effort démontré et répétitions. Elle sera dans ces espaces de performances partagés l'esprit du lieu qui parfois tente de s'y fondre. Tout au long, j'ai particulièrement apprécié ses différentes déclinaisons de la marche et aussi ses déplacements avec juste devant elle, ce "papier" qui nous rappelle que nos préjugés peuvent nous masquer le regard vers le "devant" !
Au final, une soirée durant laquelle le spectateur que je suis a dû s'adapter, mais une fois cette adaptation faite, le plaisir de découvrir les différentes symboliques a été au rendez-vous. Et de ces quatre heures, difficile pour moi de tout mettre en mots ce que j'ai pu découvrir, mais j'en retiens que j'apprécie beaucoup les perspectives sur le monde que les "pas" et les mouvements peuvent me présenter et cette soirée en était fort riche.