À la présentation de cette histoire, celle de Camille, mes pas m'y avaient déjà amené en 2019 et j'en avais gardé et partagé de belles traces.
( https://surlespasduspectateur.blogspot.com/2019/09/sur-mes-pas-de-spectateur-les-yeux.html).
Depuis, l'équipe de création a poursuivi son travail ("joyeux" défi en ces temps de pandémie !) et elle a préparé une version en langue anglaise qui est présentée au Centre Segal en ce début d'été. Voilà donc pourquoi, mes pas m'amènent pour découvrir cette plus récente mouture concoctée par Audrey-Anne Bouchard et son équipe d'interprètes, Peter Farbridge, Alexandra Laferrière, Laurie-Anne Langis, (aussi chorégraphe de cette proposition) Marc-André Lapointe, Sarah Leblanc-Gosselin and Joan Wiecha.
Permettez moi de préciser, en entrée de jeu, que cette proposition théâtrale est bien particulière, parce que nous sommes dépouillés d'un de nos sens, habituellement fort sollicité, celui de la vue. En effet, avant d'entrer dans le lieu de "rencontre" (ou de non-rencontre) avec Camille, je devrai enlever mes lunettes et mettre un bandeau qui me rendra visuellement imperméable à ce qui se passera autour de moi, mais et ce "mais" est important, rendra en contrepartie, mes autres sens fort perméables.
Il en reste que s'il y a un sens dont je suis fort dépendant, c'est bien celui de la vision et malgré mon apparente désinvolture à m'en départir, il y a en moi, une angoisse fort bien présente, juste avant de faire cette rencontre, que je dissimule du mieux possible.
Pendant les premiers moments, fébrile, mon ouïe est en alerte guettant le moindre signe d'activité sonore qui s'avère être, en premier, le signal du déclenchement d'un répondeur. Non, ce n'est pas mon imagination ou celui d'un cellulaire d'un spectateur, parce qu'il revient à mes oreilles ! Et puis, le tout débute et tout au long de ce qui suivra, je découvrirai le résultat du grand vide créé par le départ de Camille par celui qui le ressent fortement, sinon douloureusement, son ami Pierre. Tout au long, nous "irons" en différents lieux, dont dans ce café. et son odeur fort caractéristique. "Mes pas" m'amèneront même à l'extérieur sous la pluie (!), sous un parapluie. De ces lieux, de ces rencontres et de ce que ressentent les personnages, je le perçoit fort bien grâce à mes autres sens. Cette écharpe, oubliée, récupérée et conservée, élément central de cette histoire, j'ai même le droit de m'en recouvrir pendant quelques instants et elle me fait grand bien.
Pendant toute cette heure, je me suis senti, encore une fois, immergé par le vide créé par le départ de cette femme. Cette histoire présentée en langue anglaise, même pour un francophone que je suis, est très accessible. Et de la vivre sans sa vision y donne une "coloration" fort différente, intéressante, rehaussée même.
Si je devais rester assis tout au long de la représentation, plutôt que de me déplacer comme la première fois, durant laquelle j'avais même dansé (!), mon plaisir est resté tout entier tout au long. Je dirais même que cette perspective immobile de spectateur, mais totalement à l'affût, je l'ai préférée !