Cette proposition n'était pas dans mon viseur de spectateur en début de saison, mais une rencontre (merci Laurie-Anne !) l'a intégré dans mon agenda de sortie. Ainsi donc, je me rendrai au M A I (Montréal, arts interculturels) à la rencontre, "les yeux fermés" de "Camille : un rendez-vous au delà du visuel." de Audrey-Anne Bouchard Et cela parce que j'ai eu la bonne et prévoyante idée de réserver tôt mon billet et que, je le saurai plus tard, chaque représentation se donne avec (et non pas devant !) un nombre limités de spectateurs.
Photo de Laurence Gagnon Lefebvre
Une semaine avant de me rendre à cette rencontre, j'ai eu droit à un premier courriel pour bien me préparer à ma "rencontre" avec Camille. Rappel qui me fût de nouveau fait la veille, mais j'étais prêt et c'est une vingtaine de minutes avant l'heure annoncée, comme demandé, que mes pas franchissaient le seuil du MAI. Fait surprenant pour ceux qui me connaissent, je suis le dernier à arriver et l'endroit est très calme. C'est donc sur place que je réalise que nous ne serons que six spectateurs. J'aurai donc droit à un accueil personnalisé de la conceptrice, Audrey-Anne, tout sourire. Je suis invité à laisser mes effets personnels dans un contenant et à enlever mes chaussures, ce que je ferai, tout habitué de Tangente que je suis! Je devrai choisir un bandeau confortable qui fera de moi, le temps de la présentation et un peu avant, question de bien revêtir le "costume" de spectateur. C'est donc dans le café du lieu de présentation, n'y voyant rien ( et les yeux fermés pour en être certain !), une fois les crédits de l'oeuvre dits, que débute la rencontre.
Nus sommes guidés vers l'entrée de la salle qui est en fait la salle d'exposition du lieu. Nous sommes là, les six dont deux non voyants, côte à côte, je suppose (!), prêts à entrer dans le lieu. Déjà mon statut de voyant évolue vers celui de non-voyant, à la merci des autres, ce qui je dois l'avouer me déstabilise. Cette dérive d'angoisse est interrompue par une main bienveillante qui me fait entrer dans le lieu.
Et c'est là que mon angoisse se dissipe totalement et que mon attention se concentre sur ce qui se passe. Avec mon sens de la vision est absent, je fais deux constats très personnels. D'abord, mes autres sens s'exacerbent, mais aussi et surtout mon imagination, elle, devient fort active. Déjà lorsque mes yeux découvrent une oeuvre chorégraphique, elle est fort active, mais là, c'est comme pour un véhicule de course, une injection de nitro ! Elle est décuplée !
Pour la suite, pas question de vous en dire plus, parce que malgré le fait que "Camille : un rendez-vous au delà du visuel." soit présentée à guichet fermé, je souhaite et je prédis aussi qu'elle soit représentée. Et le plaisir est dans la découverte, n'est-ce pas !!!
Mais je peux vous dire (ou vous écrire) que tout le long de ma rencontre avec ceux que Camille a laissé derrière elle, dont surtout Pierre son ami, j'ai ressenti fortement son absence laissée derrière elle. Cette obscurité a eu différentes colorations, oui, oui ! le noir peut avoir différentes teintes les yeux fermés, je peux en témoigner ! Tout au long de mes rencontres dans différents lieux, j'ai été guidé, j'ai fait des rencontres, mais surtout j'ai ressenti "les traces" de celle, qui a décidé d'aller ailleurs.
Tout au long de ce parcours, j'ai été guidé avec finesse et doigté ! Ton absence Camille, je l'ai ressentie, sans mes yeux, mais enrichi par mon imagination fort active et par mes autres sens, comme si j'étais un personnage délaissé par ton départ.
Et puis, arrive la fin ! Nous serons invités, à notre convenance, "à revenir ici et maintenant" ! Pour aussi avoir la chance, dans le café de l'endroit, de rencontrer les interprètes (Mariejoe Foucher, Laurie-Anne Langis, Marc-André Lapointe, Sarah Leblanc-Gosselin, Oliver Rousseau et Guenièvre Sandré) et Audrey-Anne Bouchard. Juste avant leur arrivée, entre spectateurs, non-voyants et voyants, avons échangé sur ce que nous venions de vivre et toutes et tous étaient comblé.es.
Pour moi, dont le yeux sont d'une importance vitale, j'ai compris le temps de ces moments qu'il est possible de traverser "la vie" sans eux avec une perspective différente et aussi riche. Merci Audrey-Anne !
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