J'ai hésité à faire cette rencontre, mais comment dire en mots, les regrets que je n'aurais pas eu (puisqu'absent) si je n'avais pas assisté à "Danse et communauté" de Sarah Dell'Ava, grâce à Tangente. De cette dernière phrase composée avec plein de négations, je ne peux que la clarifier, j'en suis sorti comblé de cette présentation. Loin des standards habituels de la danse, la chorégraphe nous entraîne dans une démarche décrite, "coeur à coeur, corps à corps", mais qui, selon moi, dépasse les interactions humaines, fort bien présentées d'ailleurs, pour celle de la création de notre monde.
Pour y voir plus clair, je vous présente mon expérience de spectateur. À l'entrée de la salle, nous devons enlever nos chaussures pour prendre place sur le plancher de la salle, soit sur des chaises, tout autour, près des murs de la salle, soit sur des coussins, plus au milieu de la place. Les gens prennent place et moi, j'observe. Il y a parmi nous des interprètes de cette pièce que je reconnais. Une fois la salle "full pleine", les portes se referment et la quinzaine d'interprètes prennent place à tour de rôle au milieu de nous.
Photo de Kiyane Racine et Marie Mougeolle par Sarah Dell'Ava
Peu à peu au rythme de leur coeur, nous les entendons expirer et bouger de plus en plus en phase. Comme si je voyais la création du monde, au premier jour, par leurs pulsations et leurs déplacements. Ce magma originel ou cette première cellule, je suis avec fascination son évolution . Arrive le moment de leur spéciation et là, mes sens (ouïe et vue) de l'observation sont mis à l'épreuve. Parce que, six territoires (ou continents) sont créés, de façon fort différentes et qui sont par la suite habités par des êtres qui s'y exprimeront en gestes, seul ou en duo ou en groupe. Dans ce monde dans lequel les contacts sont essentiels au propos, comme dans la vraie vie, comment tout suivre, devant et derrière moi, voilà le défi du spectateur. Il en reste que je le ressens fort bien et moi qui comme simple spectateur, je me sens interpellé et je voudrais bien y participer.
Mais le tout se passe autour de moi. Arrive le moment que les interprètes viennent à la rencontre des spectateurs et les invitent à prendre place autour de ces territoires habités. D'abord en petit nombre, les invitations incluent à peu près tous les spectateurs, dont moi, fort heureux, à venir participer au rythme de mon coeur aux mouvements collectifs de tous. Difficile de bien décrire ce que je ressens, mais cet organisme originel qui s'est divisé devant moi, il s'est "resolidarisé" au son des chants et au rythme des mouvements de cette collectivité du moment.
Au final, quoi dire de plus que la danse contemporaine peut se décliner de façon fort différente, mais aussi de façon fort surprenante. Elle peut se voir, mais aussi elle peut se vivre. Il peut en émerger des moments de bonheur qui nous laisse une trace au coeur et au corps. Merci Sarah et toute ta gang pour ton travail patient (un an, si mes renseignements sont bons) à créer des moments qui nous montre la direction vers laquelle notre monde devrait aller.
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