Cette année, mes pas m'amèneront moins souvent qu'à l'habitude pour découvrir ce déferlement annuel d'oeuvres "fortes" et marquantes que propose le FTA. Et ce n'est pas par choix, dois-je l'indiquer. Il en reste que je pourrai y ajouter une touche de OFFTA, pour diminuer le manque du "junkie culturel" que je suis. Donc, lors des choix, j'ai choisi avec minutie en évitant les oeuvres d'ici (tel Ulysse attaché à son mât), espérant les retrouver plus tard sur une scène montréalaise "dans pas long" ! De ce "dur" et déchirant labeur, en est ressorti quelques oeuvres de danse et, c'est vers l'une d'entre elles que mes pas m'ont d'abord amené à l'Usine C pour "7 Pleasures". Présentée deux soirs seulement, le hall était fort rempli et, j'étais rassuré, le choix que j'avais fait était partagé par plusieurs. Bon, il est vrai que si vous mettez sur scènes douze corps nus et que vous requestionnez les modes de vie actuels, le public curieux sera attiré. Et Mette Ingvartsen, pendant plus d'une heure trente et ses douze interprètes nous propose une oeuvre tout aussi haute en esthétique qu'en intensité. Pour ma part, c'est l'aspect viscéral de sa proposition qui m'a le plus rejoint et qui a fait que ce premier choix a été réussi. Mais, commençons par le début.
La salle se remplit sur un fond sonore percussif de moins en moins discret. Les portes arrières de la salle se ferment et tout à coup, des spectateurs (les interprètes, en fait !) se lèvent et se déshabillent à leur place chacun à son rythme et se dirigent vers la scène. Tous sauf une, se retrouveront "agglomérés" dans une masse d'entrelacements à l'arrière-scène gauche, tandis que l'autre est sur un fauteuil à l'avant-scène droit. Fin du premier tableau de sept (tel que le titre de l'oeuvre le laisse supposer) qui nous présentent des états de chair ou des états d'être, ou les deux pour mieux dire. Le deuxième tableau, superbe, présente l'écoulement des corps vers celui qui est seul. La chorégraphe indiquait durant la rencontre après la représentation qu'elle s'était inspirée de la viscosité et moi, l'enseignant de chimie, est tout à fait d'accord. Dans cette suite de tension-élongation de la matière corporelle, les interactions physiques se font tangibles et tellement ressemblantes à celle des foules. Juste ce tableau valait le prix du billet, mais nous n'en étions qu'au deuxième.
Photo de la chorégraphe tirée du site du FTA
Je ne vous ferez pas le compte-rendu de tous les autres, mais impossible pour moi de ne pas partager ce que j'ai ressenti encore lorsque ces corps se sont mis à s'agiter de façon frénétique sur fond de percussion forte et puissante. De ce long et insistant déferlement, les interprètes en ressortent épuisés, comme moi et certainement la majorité des spectateurs. Les tableaux alternent entre des moments forts et d'autres plus calmes. Arrive le moment durant lequel, certains interprètes se départissent de leur nudité pour revêtir en tout ou en partie leur différence. Difficile de pouvoir savoir si le rapport de force entre les interprètes se modifient, si ceux habillés gagnent ou perdent du pouvoir par rapport à ceux restés nus. D'autant que certains vêtements se passent de l'un à l'autre. Ce qui selon moi, appuie une citation de Mette Ingvartsen du feuillet de la soirée, "Avec le sexisme persistant et les positions conservatrices de plus en plus répandues, il est primordial de proposer d'autres manières de vivre ensemble". Et c'est sur une finale tout en revendication-affirmation, durant laquelle les douze interprètes prennent un objet du décor et le brandissent face à nous.
Brasser les choses, les certitudes, les convictions en éclaboussant le propos sur les spectateurs en utilisant la nudité, Dave St-Pierre l'a déjà fait et très bien ici. Mette Ingvartsen le fait à sa façon et le réussit très bien. La chorégraphe, fille d'une ancienne hippie danoise qui a porté la révolution sexuelle des années 60, tente de rebrasser la cage aujourd'hui et dans un sens plus large, selon moi. J'ai été un peu amusé aussi, suite à une question, lorsqu'elle se demandait si nous étions habitués à voir de la nudité de cette façon. Il faudra revenir chère dame, vous qui étiez à votre première visite ici et apprendre à mieux nous connaître. D'autant que votre perspective de la société mérite que nous l'approfondissions.
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