Mes derniers pas au FTA édition 2017 m'ont amené dans cette grande (qualificatif un peu surprenant, j'en conviens, mais j'y reviendrai) salle du Théâtre Rouge du Conservatoire. Au programme, "Tordre", de Rachid Ouramdane, avec sur scène Annie Hanauer et Lora Juodkaite. Une oeuvre qui s'annonçait comme une plongée dans l'intimité de deux femmes particulières, "Nous sommes tous différents, mais il y a des gens qui portent davantage leur différence que d'autres.", "dixit" le chorégraphe dans le feuillet. Citation tout à fait annonciatrice de ce que nous pourrons découvrir. Je suis fort heureux d'avoir choisi la première rangée pour cette incursion de ces deux univers féminins, parce que dans cette salle, je ne suis pas certain que j'aurais ressenti la même chose de plus loin. (Note à moi-même: Tenter de trouver un spectateur présent dans les dernières rangées et lui poser la question*).
Photo de Michel Cavalca tirée du site internet Mascarille
Ainsi donc après une entrée à la matière marquée par la répétition des mouvements, les rencontres individuelles, seront celles qui m'auront le plus marquées. Si j'ai parfois été dérangé par les transitions, les différents tableaux avaient ce qu'il fallait comme longueur pour remettre le focus sur la rencontre de la particularité de la femme qui s'exprimait là, juste pour et devant moi.
De Lora Juodkaite (qui est lituanienne), nous découvrons sa façon de s'exprimer et de tourner ("spin") dans deux tableaux, d'abord très longuement et dans le deuxième en tournant tout en nous parlant, sur le ton calme et posé de la confidence, de cette habitude qu'elle a depuis sa tendre enfance. À la fin des deux fois, moi épuisé juste à la regarder, elle s'arrête sans montrer le moindre signe de fatigue et d'étourdissement. Preuve qu'elle a complètement intégré cette façon d'être. Durant le premier tableau surtout, il est fascinant de suivre les variations de rythme et le jeu de son corps et de ses bras, déclinant des variantes parfois surprenantes.
De Annie Hanauer (qui est américaine), nous découvrons plus ou moins rapidement qu'elle porte une prothèse pour remplacer son avant-bras. Je dois avouer qu'il m'a pris un certain temps, sinon un temps certain pour le réaliser et ce n'est pas parce que elle le dissimulait. De notre rencontre, je retiendrai surtout son sens de la direction à provoquer le début et de ses mouvements tout au long du long et intense tableau, mais que je reverrais encore et encore, sur l'interprétation de "Feelings" de Nina Simone (version que je ne connaissais pas !!!). Faire corps avec la musique, elle m'en a fourni un exemple mémorable.
Je serai honnête ici et d'indiquer que cette oeuvre a travaillé en moi avec un certain décalage, parce qu'en sortant, mon impression était plus mitigée. Probablement trop affecté par les transitions et la fin plus légère. Mais, je comprends, qu'il me faudrait la revoir un de ces jours pour moins rester accroché à des détails, tel que "est-ce vraiment elle qui nous parle en tournant ou sa voix par une bande pré enregistrée ?"
Pour ceux et celles qui ont constaté qu'il y avait une étoile (*) à la fin du premier paragraphe, en voilà la raison. À cette question que je me posais, dès le lendemain, j'ai eu la chance d'avoir une réponse d'un spectateur qui était dans la dernière rangée et qui m'a indiqué qu'il avait très bien ressenti cette intimité présentée et qui avait beaucoup apprécié. La vie du spectateur qui a droit souvent qu'à la seule perspective de sa place assise, envie ceux qui peuvent découvrir plus qu'une fois de différents endroits.
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