Il y a de ces coïncidences qui ne semblent pas en être. Mes pas m'amenant assister à la présentation de "Fluidité du genre" programme double présenté par Tangente dont le sous-titre est "Du stéréotype à l'icône: transcender les masculinités", je lisais le plus récent livre de Martine Delvaux, "Le monde est à toi". Juste avant d'arriver, j'en étais rendu au passage (page 63) " Je ne refuse pas l'identité qui est collée sur mon corps, qui correspond aux organes génitaux avec lesquels je suis née, ce genre qu'on dit féminin. Pourtant, je ne dirais jamais, comme pour l'affirmer: Je suis une femme.". Ainsi donc, dans les minutes qui ont suivi, Manuel Shink dans "La mécanique des dessous" et Sébastien Provencher avec "Chidren of Chemistry" me proposaient leur version chorégraphique fort éloquente et réussie aussi, de la perspective masculine de ce passage.
En première partie, Manuel Shink (chorégraphe et interprète) nous apparaît de noir vêtu. Ses apparats sont simples, mais dissimulent d'abord une personne qui, par ses longs cheveux d'abord montre un son côté féminin. Vient ensuite la "présentation" de sa barbe et de son torse bien poilu. La nature double ou "queer" du personnage est rapidement bien campée. Par la suite, j'y ai vu une intéressante réflexion sur les attributs corporels ou vestimentaires tout au long des métamorphoses présentées, colorées de noir, de blanc et de rouge. Impossible de rester insensible à cet audace tout au long de son cheminement. Pour ceux et celles qui veulent tracer une frontière sur l'identité sexuelle d'un homme ou d'une femme, il nous force à reconsidérer notre position de qui sommes-nous vraiment. À cet démonstration, j'ai été fort sensible et interpellé aussi.
Photo de Juanel Casseus
Après une pause fort appropriée, nous revenons dans la salle, reprendre notre place pour découvrir "Children of Chemistry" de Sébastien Provencher avec Miguel Anguiano, Jean-Benoit Labrecque, Louis-Elyan Martin, Alexandre Martin et Simon Renaud. De mon côté, je redécouvrais cette oeuvre que j'avais vu sur une scène extérieure, il y a un peu plus d'un an au Festival Quartier-Danse. Avec des relents de souvenirs encore présents de cette chorégraphie sur l'identité sexuelle déclinée au pluriel, comme je l'avais écrit à l'époque, j'étais bien curieux de connaître dans quelle direction le chorégraphe avait fait évoluer son propos pour cette présentation en salle. Il est facile de constater que dans cette version actualisée et bonifiée, la trame de base est conservée, mais que le propos lui s'est développé et est rendu encore plus audacieusement.
Photo de Justine Latour
Nous avons d'abord droit à une entrée en la matière toute empreinte d'un doux immobilisme avec les cinq interprètes habillés différemment de blanc et de beige. Les différences sont notables mais seulement pour celui et celle qui y porte attention. L'affirmation de chacun se fait doucement, en harmonie d'abord, mais peu à peu ils se désolidarisent et se particularisent. La suite montre sur un tableau "Cat walk", les différents aspects de nos personnalités, avouées ou non, jusqu'au dévoilement total de ce que nous sommes. Il y a aussi cette masculinité, qui s'exprime par la compétition et l'émulation dans le groupe. Au final, de ces différences, de nos différences d'homme, il en reste un aspect commun de la nature toute autant masculine qu'humaine que le chorégraphe nous transpose fort bien dans le dernier tableau. Un Big Bang initial qui nous amène inévitablement à un Big Crunch dans lequel les différences s'amalgament.
Voilà deux propositions danse audacieuses qui permettent aux spectateurs qui sauront faire les pas devant de se faire rappeler que les différences et les similitudes ne sont pas seulement celles que les chromosomes nous donnent. Et que nos attributs masculins ne sont qu'un aspect de ce que nous sommes, fondamentalement. Et quiconque en doute, devrait assister à la "Fluidité des genres".
Aucun commentaire:
Publier un commentaire