Merci Klara et bonjour à vous tous,
Lors de ma plus récente chronique, je vous présentais les
prémisses de ma toute personnelle perspective spectrale pour apprécier une
œuvre chorégraphique et mieux comprendre son interaction avec les spectateurs.
Pour porter un éclairage plus complet, je vous invite à poursuivre ma
présentation en y ajoutant des exemples. Ainsi donc, une œuvre est composée
d’une partie visible, allant du rouge éclatant au violet plus discret, en
passant par le jaune, riche de sa chaleur scénique et le bleu plus profond. Chacune
des œuvres nous propose un profil spectral qui lui est propre. En face, il y a
le spectateur qui comme un détecteur peut être plus sensible à certaines de ces
couleurs.
Pour tenter d’illustrer mon propos sur la couleur
d’une œuvre, je reviendrai d’abord, sur ma plus récente sortie chez Tangente
qui donnait carte blanche à Cédric Delorme-Bouchard, concepteur de lumières pour
un programme triple et que nous avons reçu ici. La première partie de Castel
Blast était riche dans la partie violette, par sa sobriété, sans nous proposer
une partie rouge fort éclatante. Camille Lacelle-Wilsey avec sa proposition,
nous entraînait, elle, dans la partie rouge éclatante, sinon écarlate de
passion, serais-je tenté d’ajouter, peu intense dans la partie violette ! Entre
ses deux œuvres qui possèdent des spectres complémentaires, nous avions droit à
Annie Gagnon et une nouvelle version, de ma perspective, de son « Rituel
géométrique » qui nous plongeait tout en profondeur dans le bleu, riche de
sa sagesse et de sa poésie. Trois œuvres complémentaires qui, au final,
couvraient l’ensemble du spectre dans le visible et pouvaient donc, satisfaire
un grand nombre de détecteurs, oups (!) de spectateurs.
Mais la partie visible, comme vous le savez maintenant
est complétée par deux autres parties, l’ultraviolet et l’infrarouge. Pour
cette fois, je veux porter votre regard vers cette dernière. Cette partie
spectrale, touchant nos émotions, se décline en trois parties, le proche, le
moyen et le lointain infrarouge. Toutes invisibles soient-elles, chacune de ces
parties produit des effets temporels différents. La partie proche-infrarouge de
l’œuvre, lorsque présente, c’est surtout mais pas seulement, au moment de la
présentation que nous la ressentirons. Une émotion de joie, ou de peine, par
exemple, qui pourra se ressentir fortement ou non sur le moment, mais qui pourrait
se dissiper assez rapidement. Si les émotions mises en mouvement dans l’œuvre, s’avèrent
beaucoup plus fortes ou touchent un de nos points sensibles, elles pourront
produire des harmoniques, comme le diraient les spectroscopistes, qui seront
encore fort présentes et qui résonneront en nous pour un certain temps, sinon
un temps certain.
Des exemples éloquents de ce type d’œuvres produisant
ce type d’effet, nous ont été proposés, selon moi, ces dernières années par Daina
Ashbee, qui avec « Unrelated », « When the ice melts, will we drink the water ? », « Pour »
et, plus récemment, « Serpentine ». À chaque fois, elle a exploré
l'univers féminin, ou de celui de notre Mère Nature, durant lesquelles, elle
nous plongeait dans une mer d’émotions. Et à chaque fois, à des nuances près, j’ai
ressenti fortement et profondément, ce que peut être une agression, fortement
colorée de violence. Avec une simplicité scénique fort efficace, chacune de ses
œuvres nous interpellent au moment de la rencontre, mais aussi et surtout, bien
longtemps après. Par exemple, durant « Serpentine », incarnée
par Areli Moran, elle le faisait
en trois temps relativement identiques durant lesquels, la notion d’harmoniques,
caractéristiques des infrarouges prend tout son sens. Spectateur, suis-je, mais
aussi un peu observateur, j’ai pu assister au départ d’un bon nombre de
spectateurs, tout à fait similaire au phénomène de saturation d’un détecteur.
Montrant bien que notre capacité de détection est fort variable. Mais peu
importe, lorsque nous repartons, impossible de ne pas méditer longtemps sur son
propos appuyé qui n’avait pourtant pas une intensité si forte dans la partie du
visible, mais qui répercutait en harmoniques !
Je pourrais poursuivre plus de l’avant vers la région
de l’ultraviolet, mais pour l’instant je m’arrête ici. Bonne prochaine semaine
de danse.
Aucun commentaire:
Publier un commentaire